Il est une heure du matin, ce 18 mars 1871, les sentinelles assoupies de la Garde nationale veillent sur la nuit des Parisiens. Au Louvre, Adolphe Thiers, le général Le Flô, ministre de la Guerre, et les généraux Vinoy et d’Aurelle se sont réunis en Conseil de guerre. Afin de « récupérer les canons dérobés à l’État » (lire l’épisode 4, « “Nous sommes 300 000 à veiller sur les canons…” »), un plan imparable est élaboré. Les 40 000 hommes de Vinoy, formés en quatre divisions, occuperont les boulevards, Belleville et Montmartre seront conquis simultanément, leurs parcs d’artillerie et leurs dépôts de munitions enlevés. Ceci fait, la troupe, les gendarmes, les bons bataillons de la Garde ralliés au gouvernement occuperont les Buttes-Chaumont, les gares du Nord et de Strasbourg (aujourd’hui gare de l’Est), le boulevard de la Villette, la place de la Bastille, l’Hôtel de ville et la Cité, le Luxembourg, les Invalides, la caserne du Prince-Eugène (aujourd’hui caserne Vérines, place de la République) et les Tuileries. Le chat est dans le sac, pense Adolphe Thiers.
Dans une longue adresse aux habitants de Paris placardée dans la nuit, il menace :
« Depuis quelque temps, des hommes malintentionnés, sous prétexte de résister aux Prussiens, qui ne sont plus dans vos murs (lire l’épisode 3, « L’ennemi prussien a quitté Paris ! »), se sont institués les maîtres d’une partie de la ville, y ont élevés des retranchements, y montent la garde (…) par ordre d’un comité occulte qui (…) veut former un gouvernement en opposition au gouvernement légal. (…) Ces hommes braquent des canons qui, s’ils faisaient feu, ne foudroieraient que vos maisons, vos enfants et vous-mêmes. (…) Le gouvernement, institué par la nation tout entière, aurait déjà pu prendre ces canons dérobés à l’État (…) et mettre sous la main de la justice les criminels qui ne craindraient pas de faire succéder la guerre civile à la guerre étrangère. (…) Le gouvernement est résolu à agir. Les coupables qui ont prétendu instituer un gouvernement à eux vont être livrés à la justice régulière. Les canons (…) vont être rétablis dans leurs arsenaux. (…) Que les bons citoyens se séparent des mauvais. (…) Parisiens, (…) vous nous approuverez de recourir à la force, car il faut à tout prix, et sans un jour de retard, que l’ordre, condition de votre bien-être, renaisse entier, immédiat, inaltérable.
Paris, le 17 mars 1871.
Thiers, président du Conseil, chef du pouvoir exécutif ; les membres du gouvernement. »