Quand les rivières et les nappes sont à sec, non seulement l’eau disponible se fait rare mais les polluants qui s’y trouvent sont encore plus concentrés. Si on continue à y envoyer des substances toxiques, le casse-tête devient quasiment insoluble. Voici, résumée grossièrement, la situation à laquelle sont désormais confrontées les autorités et les habitants des Deux-Sèvres. Déjà frappé par des sécheresses et par de féroces batailles autour de mégabassines
En février dernier, l’agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine révélait qu’entre 50 % et 75 % de l’eau potable des Deux-Sèvres était hors des clous. Grâce à des tests réalisés depuis juillet 2023, il a été prouvé que la majorité de l’eau distribuée dans le département dépasse la limite de qualité réglementaire fixée (0,1 microgramme par litre) pour le R471811. Un nom de code pour un résidu
Rappelez-vous, on vous parlait déjà des Deux-Sèvres au début de cette série (lire l’épisode 3, « Bassines : l’État brûle le droit ») et on vous promettait d’y revenir. On vous racontait que, là-bas, les bassines avaient d’abord été l’objet d’un consensus. Fait rarissime en France, elles avaient reçu l’approbation de plusieurs associations environnementales locales et de plusieurs élus, dont Delphine Batho, députée Génération écologie et ancienne ministre du Développement durable. Pourquoi ? Parce que les irrigants s’étaient engagés à des changements de pratiques agricoles, notamment une réduction de l’usage de pesticides. En clair, les écologistes donnaient leur feu vert pour qu’une partie de la profession puisse stocker de grands volumes d’eau à des fins d’irrigation, à condition qu’elle fasse des efforts pour polluer moins. Oui à l’appropriation par quelques-uns de la ressource si cela peut permettre à l’eau, qui reste un bien commun, d’être de meilleure qualité.
Administratrice de Deux-Sèvres Nature Environnement, Magali Migaud se souvient de lourds débats au sein de son association face à ce deal, en particulier en décembre 2018, au moment de la signature du protocole d’accord : « Il y avait des désaccords entre des personnes qui y croyaient et d’autres non. Notre conseil d’administration a accepté la signature en se disant que ça pouvait faire avancer les choses et qu’une impulsion vers l’agroécologie était possible sur notre territoire. Il a voulu croire à un changement franc et massif des pratiques agricoles. »