Isaac regarde passer les chalands depuis la Boucherie du coin. Ils se font rares en cette période de Pessah, la pâque juive, très observée dans ce quartier de Sarcelles, dans le Val-d’Oise, surnommé « la petite Jérusalem ». C’est Eddy, son fils, qui tient ce commerce dont toutes les viandes sont certifiées casher. Si ce dernier n’est pas très enclin à parler politique, Isaac ne se fait pas prier pour commenter les résultats du premier tour de la présidentielle : « Ici, c’était très Zemmour, raconte le septuagénaire coiffé d’une kippa, d’origine tunisienne et arrivé en France dans les années 1960. Il y a beaucoup de gens qui voulaient du changement, parce qu’il y a beaucoup de gens qui sont emmerdés tout le temps. Dans le quartier, au début des élections, tout le monde parlait de Zemmour. Beaucoup se sont dit : “Peut-être qu’il va faire quelque chose.” »
Balayé au niveau national avec 7,07 % le 10 avril dernier (lire l’épisode 1, « Ça marche encore »), Éric Zemmour fait plus de quatre points de mieux à Sarcelles, avec 11,5 % des voix. Le polémiste pulvérise surtout son score dans les bureaux de vote des quelques rues qui charpentent cette « petite Jérusalem », où vivent 10 000 à 15 000 Français de confession juive. Le polémiste arrive largement en tête dans les trois bureaux situés au cœur du quartier : il y engrange 39,8 %, 37,1 % et 35,2 % des suffrages exprimés, soit plus de cinq fois son score national.