Chicago, envoyée spéciale
Il est 7 h 45, samedi matin. Les rues de Hyde Park à Chicago sont calmes. Deux bus attendent sur un parking entre une station-service et un McDonald’s ; un petit attroupement s’est formé. Des sympathisants d’Hillary Clinton se sont portés volontaires pour un voyage dans l’Iowa, à trois heures de route de Chicago. Cet État frontalier de l’Illinois, peuplé à 92 % de Blancs, est considéré comme un swing state, où le scrutin s’annonce très serré. C’est dans ces « battleground states », objets de toutes les attentions des candidats, que se joue réellement l’élection présidentielle. Ce matin, ils sont une soixantaine à faire le déplacement depuis Hyde Park pour faire campagne de l’autre côté de la frontière ; plusieurs centaines de militants partent au même moment d’autres quartiers de la ville. Certains d’entre eux ont déjà fait du porte-à-porte dans l’Iowa la semaine dernière. La quasi-totalité sont afro-américains.

« Nous venons du district de Barack Obama et nous en sommes fiers. Pour lui, tout a commencé ici. Et ce n’est pas une coïncidence si le premier président noir des États-Unis est venu de Chicago. Dans cette ville, nous savons exister, c’est notre histoire, notre rôle. » Aldophus Kindle, dit « Al », est au micro. Il a connu Obama dans les années 1980, quand celui-ci était « organisateur de communauté » dans le South Side de Chicago, notamment dans la cité Altgeld Gardens. Al travaille pour les démocrates, il galvanise les participants : « Nous avons vu Barack la semaine dernière, il nous a dit : “Continuez à vous battre.” À nouveau, nous allons faire l’histoire. » Des exclamations et des applaudissements ponctuent son petit speech matinal.
Mon voisin me glisse : « Les républicains veulent effacer le nom d’Obama, mais ils oublient que c’est nous qui l’avons élu et qu’on ne peut pas nous faire disparaître comme ça. » Yemi est venu du Nigeria faire ses études à Chicago dans les années 1970. Il y est resté, y a fait carrière, notamment chez L’Oréal. Il a la nationalité américaine. Il vit dans l’une des tours de Hyde Park.
Je suis sûre qu’ils ne trouveront rien de solide contre elle, sinon on le saurait déjà. Mais le temps que l’enquête se fasse, on sera après le scrutin.
La veille, le FBI a décidé d’enquêter sur de nouveaux mails d’Hillary Clinton. Carla, l’une des animatrices de ce voyage, soupire : « Quand j’ai vu ça, je me suis dit : “Non… Si peu de temps avant l’élection !” Je suis sûre qu’ils ne trouveront rien de solide contre elle, sinon on le saurait déjà. Mais le temps que l’enquête se fasse, on sera après le scrutin. » Elle a l’air inquiète d’une remontée de Trump.