Shida Shahabi, Living Circle (130701/FatCat Records, 2023)
Est-on encore capable d’écouter ? D’écouter vraiment, à l’heure du trop-plein de musique et de contenus divers qui nous sont projetés chaque jour, chaque heure et chaque minute même, dans nos vies perpétuellement connectées ? C’est l’une des questions que nous pose la Suédoise Shida Shahabi avec son deuxième album, le profond et malléable Living Circle. Un disque de patience décidée, qui nous parle aussi de l’idée de plus en plus anachronique de ne rien faire et d’attendre. On en a tous et toutes besoin, ça fait souvent du bien de différer le moment d’agir ou de penser. Il faut donc prendre ce nouvel album de la jeune compositrice comme un espace de temps offert au vide, sans pour autant oublier la musique intense qu’elle y a gravée.
Les parents de Shida Shahabi ont fui l’Iran après la révolution islamique en 1979 pour s’installer à Stockholm, où elle a grandi à travers la pop perse rapportée dans leurs bagages, les succès européens de son enfance et, rapidement, un goût pour les scènes underground punk aussi bien que free jazz. Un clavier équipé d’une boîte à rythmes rachitique offert à ses 9 ans par sa grand-mère a achevé de la pousser vers la musique, qu’elle a pourtant fini par fuir après un début de formation académique qui, dit-elle dans ses interviews, commençait à l’enfermer par son exigence de rigueur et de perfection formelle qui n’était pas ce qu’elle y cherchait.