
Brigitte Fontaine et Jacques Higelin, Cet enfant que je t’avais fait, tiré de l’album Brigitte Fontaine est… (Saravah, 1973)
Dans une décision aussi historique que dévastatrice, la Cour suprême des États-Unis a donc annulé, le 24 juin, la jurisprudence de 1973 qui protégeait l’avortement dans tout le pays. C’est désormais à chaque État qu’il reviendra de légiférer sur cette question cruciale, ce qui a déjà entraîné l’interdiction de l’IVG dans plusieurs États ultra-conservateurs qui n’attendaient que ça, comme nous vous l’expliquions dans une autre obsession (lire l’épisode 22 de This is America) sur Les Jours. Quel est le rapport avec la musique, vous demandez-vous à ce moment de ce Face A, face B ? Eh bien tout, comme d’habitude. La musique est politique, la musique est sociale, la musique témoigne des remous du monde depuis que la première chanson a été inventée. La musique a donc elle aussi raconté les batailles sur le droit à l’avortement qui ont marqué ces dernières décennies, pour ou contre selon les artistes et les moments, les pays et les croyances.
Il est même étonnant de découvrir le nombre de chansons qui abordent le sujet plus ou moins frontalement. Il y a des classiques du genre, le Papa Don’t Preach de Madonna sur lequel on revient tout de suite en face B, le plus incertain Pennyroyal Tea de Nirvana, du nom d’une tisane censée être abortive, Ani DiFranco qui prend position pour une constitutionnalisation du droit à l’IVG ou raconte ce jour de janvier 1998 où une bombe a explosé devant la porte d’une clinique pratiquant l’avortement à Birmingham, dans l’Alabama aux États-Unis, Chaka Demus & Pliers qui estiment qu’avorter est un meurtre, Colonel Reyel qui raconte une histoire de fille-mère plus compliquée qu’elle en a l’air, Bigflo et Oli qui veulent nous dire on ne sait trop quoi comme d’habitude, les Supremes qui mettent les pieds dans le plat par deux fois ou, plus récemment, les superstars de la pop Robyn et Nicki Minaj qui ne cachent pas le drame qu’un avortement a été pour elles. On pourrait continuer comme ça pendant des heures, mais on notera surtout que les chansons écrites ou chantées par des femmes ont revendiqué bien plus fortement et bien plus tôt le droit à l’avortement que les artistes masculins à qui, en vérité, personne n’avait rien demandé.

En France, l’une des chansons les plus belles, mystérieuses et révélatrices historiquement est signée Brigitte Fontaine et Jacques Higelin : Cet enfant que je t’avais fait.