
Daniel Johnston, The Late Great Daniel Johnston (Gammon Records, 2004)
À vrai dire, on s’attendait un peu à la mort de Daniel Johnston, annoncée ce mercredi 11 septembre. Il n’était pas vieux
Daniel Johnston était un personnage unique dans la grande famille de la musique indépendante américaine, le cousin bizarre et bricoleur qui n’en finit pas de surprendre par son imparable talent de compositeur. On peut se consoler tant bien que mal en se disant qu’il aura eu une vie mille fois plus folle et aventureuse que beaucoup de gens aussi malades que lui, marquée par une productivité musicale maniaque qui laisse des dizaines de cassettes et d’albums à entendre. La musique, c’est d’ailleurs tout ce qui intéressait Daniel Johnston, éternel adolescent au corps d’adulte resté coincé dans ses passions de jeunesse pour les comics et les chansons des Beatles. Marqué aussi par la foi chrétienne dans laquelle il a été élevé strictement en Virginie-Occidentale. La musique fusionnait tout chez lui, qui composait pour égaler ses héros britanniques et dessinait pour habiller ses cassettes d’un bestiaire ultracodifié qui occupait son esprit.

Chez Daniel Johnston, Captain America incarne le courage ; Casper le fantôme, la rédemption ; Jeremiah la grenouille, la pureté… Joe le boxeur est Daniel, condamné à se battre contre le diable à perpétuité. Les mêmes personnages revenaient dans sa musique, en plus d’une héroïne bien vivante, Laurie, un amour de jeunesse qui fut surtout celle qui l’a poussé à enregistrer les bizarres chansons qu’il jouait alors dans les bars. Des histoires d’amours toujours déçues, pleines aussi d’un espoir aveugle très chrétien, à l’image de True Love Will Find You in the End. Des histoires de villes hantées aussi (Devil Town), de singes géants (King Kong) et de projections sur sa vie d’artiste qui, tant bien que mal, aura tourné dans le monde entier, accompagné par son père puis son frère (Sorry Entertainer, The Story of an Artist).