De Pignans (Var)
On appellera ça un bide. Dimanche 12 mars, la réunion publique du FN à Pignans (Var) n’a attiré que trois personnes, malgré « 1 500 visuels distribués », selon son organisateur, le conseiller régional Geoffrey David. Vu le petit nombre, cela ressemblait à une rencontre clandestine, limite conspirateurs, dans la salle sans lumière extérieure d’une auberge au décor vieillot, avec des fleurs dans des casseroles en cuivre accrochées au plafond, des nappes en dentelle et des trophées de chasse aux murs. Mais alors que Marine Le Pen rassemble ce mercredi soir ses militants varois pour une réunion publique à Saint-Raphaël, on n’en tirera aucun enseignement. Car au deuxième tour des régionales, en 2015, 853 habitants de cette commune du centre Var ont voté Front, soit 53,65 % des exprimés et presque un tiers des inscrits. « 60 % des gens du village votent FN mais ils ne veulent pas se montrer », constate Gilbert Perrotin, 59 ans, responsable du parti pour la commune. Ce policier à la retraite, présent à la réunion dimanche, en sourit : « Ils vous le disent à travers la porte mais pas plus. Alors je vais coller les affiches tout seul. »
Si on me voit mettre des affiches, c’est foutu, du style “voilà le facho de service”. Pourtant, toute la caserne vote Front, sauf deux.
Le Front national fonctionne comme une religion : avec des croyants, mais pas forcément des pratiquants. Un pompier venu à l’auberge explique pourquoi il garde l’anonymat : « Si on me voit mettre des affiches, c’est foutu, du style “voilà le facho de service”. Pourtant, toute la caserne vote Front, sauf deux. » Mais même s’il est majoritaire dans cette commune de 3 343 habitants, le vote FN « est encore un tabou », regrette le pompier. Et une source de railleries : « On nous ramène chaque fois à la guerre de 40 ou à Vichy, soupire-t-il. Mais c’est fini, ça ! » Il a voté une fois Mitterrand en 1981. « Il m’a bien mis. » Depuis, il a viré FN. Encarté en 2016, il veut croire à la victoire pour la présidentielle mais flippe : « Au deuxième tour, ils vont tous se mettre contre nous. Ils nous font le coup à chaque fois. »
Ce dimanche, un des trois participants est un type carré et informé, qui a lu, dit-il, les textes du fondateur de l’Europe Robert Schuman. Il raconte :