Gabe, cheveux blonds et baskets aux lacets couleurs drapeau LGBT+, raconte à Léo, hilare, ses dernières mésaventures de recherche d’emploi. Ça fait sourire Junie, qui connaît le même genre d’expériences. Clem, cheveux fraîchement tondus à l’arrière de la tête, est à moitié allongé·e sur Audre qui découpe un gâteau vegan pour Jean-Loup et Camille qui viennent d’arriver main dans la main. C’est le début du mois de septembre et il fait encore suffisamment chaud pour un pique-nique. Voici la petite bande que Les Jours vont suivre durant les prochaines semaines : Gabe, Léo, Junie, Clem, Audre, Jean-Loup, Camille. Ils… enfin non, plutôt ils et elles. Ou l’inverse : elles et ils. Mais qui est « ils » ? Qui sont « elles » ? Le groupe a opté pour le pronom « iels » – « iel » au singulier. Iels vivent à Paris et dans sa proche banlieue. Iels ont entre 20 et 24 ans, font des études, recherchent un job… Iels n’ont en fait pas grand-chose en commun à part qu’iels se posent des questions sur leur genre.
« Iels » pour dire le brouillage, générationnel, entre le « F » et le « M » inscrits à vie sur les cartes d’identité. Ce décloisonnement, je l’avais souvent approché dans une autre obsession des Jours, Les années fac (et notamment dans cet épisode vidéo), où les étudiantes que nous suivions se déjouaient du genre. Dans cette nouvelle série, nous voulons creuser ce sujet qui semble imprégner si fortement les adolescent·e·s et les jeunes adultes des années 2010. Comment se repose aujourd’hui la question du genre ? Pour le premier épisode de ce podcast, à écouter en cliquant sous le diaporama ci-dessous, la bande aborde le changement de nom et de pronom.
Réalisation : Jeanne Boezec. Photos : Simon Lambert/Haytham Pictures pour Les Jours. Musique : Jules Calvet. Durée : 14’36.
Car, pour désigner une personne, Gabe, Junie, Camille et les autres utilisent donc le pronom « iel », contraction de « il » et de « elle » – en anglais, c’est le pronom personnel pluriel « they » qui a été choisi, même au singulier. Dans cette série, nous avons décidé d’en faire de même et d’user des pronoms iel, iels, « lea », « celleux », « ellui » et « elleux » – pour la forme tonique –, qui sont les seuls (selon elleux, donc) à englober le masculin, le féminin et les autres genres. Non-binaire, agenre, gender fluid, transgenre… Ces mots-là, qu’iels ont choisi pour se définir, c’est une palette de nuances entre les deux genres. Le « il » ou le « elle » les assigne au masculin ou au féminin ; iels ne s’identifient ni à l’un ni à l’autre. Le « iel » est donc pour elleux une manière de ne pas être invisibilisé·e·s.
C’est sur internet, sur la plateforme de blogs Tumblr, où on trouve aujourd’hui des milliers d’images et d’échanges sur le thème du genre, que Jean-Loup, Camille, Audre, Clem, Léo, Gabe et Junie se sont rencontré·e·s.