Trois femmes, installées face caméra. Agnès Thouvenot, adjointe au maire de Villeurbanne à la santé, à l’emploi, à l’économie sociale et solidaire et à la lutte contre les discriminations. Maria Melchior, diplômée de Harvard, épidémiologiste et directrice de recherche à l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Delphine Zeni, psychologue au sein d’une cellule d’écoute pour les jeunes de Villeurbanne. Derrière elles, un grand kakémono bleu et rouge, avec ce message : « Cannabis, contribuez au débat ! » Il est 19 h 02, ce jeudi 10 janvier. Le direct démarre. Sous la vidéo, une centaine de commentaires défilent. « C’est un Facebook Live. Nous sommes ici pour répondre à vos questions, pour lire et répondre à vos témoignages », annonce Stéphane Cayrol, journaliste local et Monsieur Loyal de la soirée « Cannabis, effets et méfaits sur la santé », organisée au palais du travail de Villeurbanne.
C’est une démarche rare en France. Depuis décembre 2018, la municipalité a lancé une consultation citoyenne sur le cannabis, à coups de conférences, de débats et de Facebook Live, donc. Elle aborde tous les thèmes, sans œillères : santé, sécurité, légalisation. En ville, impossible de manquer les affiches bleu et rouge appelant à la participation des citoyens sur la fumette. Sur le web, une plateforme a été créée pour regrouper les contributions, qui restent encore modestes. En mars, les propositions seront collectées dans un livre blanc, qui sera remis aux parlementaires et au gouvernement afin de porter le débat à un niveau national.
Villeurbanne, 150 000 habitants, deuxième ville du Rhône et de la métropole lyonnaise, n’est pas une cité banale. Cette ville de banlieue de la taille d’une préfecture, ouvrière puis populaire, aime cultiver sa différence avec Lyon, la grande bourgeoise. Très peu endettée et bien gérée, Villeurbanne pratique une politique plus horizontale, plus participative. Elle est l’une des premières villes françaises à avoir mis en place des conseils de quartier à la fin des années 1990, avant la loi qui a acté leur création, en 2002. Une politique plus sociale, aussi, sur l’accueil des migrants, le logement ou l’emploi.

Située sur la rive gauche du Rhône, jouxtant Lyon à sa frontière est, Villeurbanne s’est construite historiquement en opposition et en concurrence avec sa puissante voisine. L’hôtel de ville de Lyon n’est situé qu’à deux kilomètres des premiers toits villeurbannais.