«Qu’il est loin mon pays, qu’il est loin… » 37 kilomètres précisément, la distance qui sépare le palais de l’Élysée d’Évry-Courcouronnes, dans la banlieue sud de Paris, et plus exactement de la salle Claude-Nougaro où se tient ce lundi une nouvelle représentation, la cinquième, du grand débat interprété par Emmanuel Macron. Loin, ce pays, songe-t-on en avisant le portrait du chanteur de Toulouse accroché au mur de cette salle municipale, si loin qu’il faut un bus de journalistes spécialement affrété par la République pour se rendre dans cette contrée lointaine. Quoi ? Un RER toutes les sept minutes ? Mais vous n’y songez pas !
On a ri, mais on a ri, aux Jours, en recevant ce mail du service de presse de l’Élysée informant les journalistes de cette nouvelle étape de la tournée du président de la République, de l’existence de ce bus au départ du palais ainsi que du déminage par le Groupe de sécurité de la présidence de la République (GSPR) afférent. Mais tant qu’à faire partie du cirque, s’est-on dit, autant monter dans la caravane. Et bien nous en a pris car, ce mardi vers 14 heures, sitôt installés dans cet autocar de colo, un scandale survient. « Il y a un pool secret ! », lance une journaliste fumasse. Allons bon. Un pool, d’accord : c’est cette pratique qui consiste à désigner des journalistes (télé, radio, photographes, rédacteurs) qui suivront au plus près le Président lors d’une visite où la meute médiatique ferait désordre et mutualiseront le travail avec leurs collègues. Mais un pool secret ? Eh bien, figurez-vous qu’Emmanuel Macron a décidé de faire un déplacement surprise avant le grand débat – on apprendra plus tard qu’il s’agissait de visiter une association d’insertion des jeunes – et qu’il a embarqué une poignée de journalistes qui refusent de dire aux autres où ils se rendent. Lesquels autres, dans le bus, l’ont saumâtre et grommellent. D’autant que les vexations s’accumulent : « Alors, persifle une journaliste à sa voisine d’autocar, tu as pensé quoi de cette conversation entre amis… ? » « … à laquelle nous n’étions pas invitées », soupire l’autre. C’est le « off » présidentiel, cette fois, qui fait des envieux, quand, la semaine dernière, Emmanuel Macron a convié quelques journalistes à discuter en tête à tête avec lui, sans caméra, ni enregistrement.

C’est la condition du journaliste de caravane présidentielle : certes, le bus est équipé de gyrophares et c’est rigolo de voir la tête des automobilistes tentant d’identifier ce convoi spécial (VIP, prisonniers ? À la réflexion, on opterait pour la deuxième solution).