À Paris, le premier policier jugé pour des actes commis pendant des manifestations de gilets jaunes n’a pas comparu pour une main arrachée, un œil confisqué ou des coups de matraque un peu trop lestes. Si Nicolas C., 54 ans, s’est retrouvé devant la 23e chambre correctionnelle ce vendredi, c’est pour outrage et rébellion contre ses collègues. Samedi 21 septembre, hors service, le capitaine de police manifestait sur les Champs-Élysées pour le 45e acte du mouvement. Il lui est reproché d’avoir lancé « bande de pédales » aux motards de la police, puis d’avoir résisté à son interpellation. Dans la foulée, Nicolas C. a été placé en garde à vue, renvoyé en comparution immédiate
Sûr de lui et tatillon, Nicolas C. ne présente pas le profil contrit que le tribunal attend d’un policier dans sa situation. Ses réponses tranchantes laissent entrevoir une personnalité fière, voire rigide. Rien en lui d’un flic proto-hippie, plutôt l’autre chapelle. Grisonnant et légèrement dégarni, portant ses lunettes surannées au bout d’un cordon, le capitaine pourrait passer pour un militaire approchant de la retraite. Il assume sa participation à de nombreuses manifestations de gilets jaunes, toujours hors service, et l’invective prononcée ce jour-là. « J’ai hurlé à la cantonnade : “Ah, voilà les voltigeurs. Quelle bande de…” Je pense que c’était très probablement “branleurs”, éventuellement “lopettes”, quelque chose de cet ordre-là. » Il ne se reconnaît pas tout à fait dans la « bande de pédales » qu’on lui impute
Face à une présidente qui le presse d’aller droit au but, Nicolas C. fournit luxe de détails, dans un langage à la fois imagé et policier. « Après avoir moi-même subi des charges et ingurgité du gaz lacrymogène, je comptais rejoindre la marche pour le climat. J’ai vu passer cette unité en colonne serrée, moto derrière moto, toutes sirènes hurlantes. » Le capitaine a voulu exprimer sa « colère de voir des manifestants pacifiques se faire casser la figure ». L’histoire ne dit pas si les motards l’ont entendu, mais aucun ne s’est arrêté ni manifesté par la suite pour dénoncer l’outrage. Ce sont des policiers de la BAC, à proximité, qui l’ont constaté.