La France a peur. Pardon d’évoquer Roger Gicquel, cet antédiluvien présentateur à la mine grave et aux cernes bistre, sur fond de décor orange-bleu-rose du 20 heures de TF1 en 1976, mais la France de 2018 a peur. Du moins, la France d’Emmanuel Macron a peur. Et elle le dit, et elle le montre, et elle le communique. Tant que ce samedi si redouté n’a pas eu lieu, il est impossible de décréter qu’il s’agit d’une trouille légitime ou d’une irresponsabilité majeure voire d’incompétence, mais la peur est là. Dans les yeux des élus de La République en marche et dans leurs mots. Dans les annonces d’une mobilisation policière massive ce samedi à Paris et dans toute la France. Dans les déclarations d’un Christophe Castaner réduisant les gilets jaunes à « 10 000 personnes et 10 000, ce n’est pas le peuple » ou de ce même ministre de l’Intérieur déclarant, dans un bel oxymore, que la journée de samedi « se profile avec inquiétude mais sérénité ». Dans les images de ces lycéens de Mantes-la-Jolie parqués à genoux, mains sur la nuque, pendant que des policiers armes à la main patrouillent dans les rangs. Dans le mutisme d’un président de la République qui ne l’a pas ouverte depuis ses trois mots lâchés en clôture du G20 à Buenos Aires il y a sept jours, préférant attendre le début de la semaine qui vient. Aura-t-elle seulement lieu ?
De ce samedi intronisé comme la mère des batailles, on ne peut rien prévoir.