Benoît Hamon en tête du premier tour, le seul candidat de la primaire socialiste (avec Jean-Luc Bennahmias) qui veut distribuer un revenu universel de 750 euros à chaque Français, voilà a priori de quoi rendre heureux les militants de cette idée. Le Mouvement français pour un revenu de base (MFRB) – non partisan, mais plutôt à gauche – en a même oublié qu’il y avait un second tour et a publié lundi un communiqué dans lequel il s’est félicité de la « victoire » du candidat socialiste, reflet d’une « victoire historique pour le revenu universel ». Le même jour, l’Association pour l’instauration d’un revenu d’existence (l’Aire, plutôt classée à droite) a, elle, adressé « ses plus chaleureuses félicitations à Benoît Hamon ». Mais dans chaque organisation, on est loin de considérer que le combat est gagné, et on observe avec inquiétude toutes les critiques adressées à Hamon. L’Aire dénonce ainsi avec « vigueur les attaques qu’il a subies de la part de ses concurrents, qui n’ont eu de cesse de caricaturer sa proposition, avec le soutien complaisant et coupable de la majorité des médias », tandis que le MFRB se dit « pleinement dévoué à continuer d’éclairer le débat, notamment sur la question du financement qui fait l’objet de tant d’attaques confuses ». Comme Les Jours vous l’ont expliqué (lire l’épisode 1, « Le revenu universel, idée de gauche… et de droite »), le revenu universel est une mesure défendue à gauche et à droite. Mais, aujourd’hui identifiée à un candidat, elle risque de voir son destin politique lié à celui de Hamon.
Mettez-vous à la place d’un militant du revenu de base. Ce qu’il vit en ce moment doit être assez étrange. Pendant des années, il a mené dans son coin un parcours personnel qui l’a profondément changé. Il a d’abord découvert qu’on pouvait distribuer un revenu à tout le monde pour combattre la pauvreté, que cette idée était non seulement généreuse mais aussi faisable économiquement. Il a beaucoup lu, s’est plongé dans des ouvrages complexes, a passé du temps seul devant un tableau Excel ou dans des réunions à quelques-uns afin d’élaborer un modèle économique de financement du revenu universel. Et là, depuis quelques semaines, dès qu’il allume son poste de télévision, il est confronté à des gens – les candidats à la primaire opposés à Hamon – qui ne connaissent rien à toutes ces réflexions mais n’ont aucun complexe pour dire tout le mal qu’ils en pensent.