C’est une prédiction un peu hasardeuse, qu’avait faite Manuel Valls, en novembre 2015. Comme des étudiants de Science-Po l’interrogeaient sur le droit de vote des étrangers non européens aux élections locales, le Premier ministre avait répondu qu’il était convaincu que cette mesure ne serait « pas reproposée à la prochaine présidentielle ». Enterrée, l’encombrante promesse formulée par la gauche à chaque élection ? Oublié, ce droit que tous les présidents depuis 1981, tous, même ceux de droite, ont un jour soutenu pour ensuite se renier, ou s’avouer impuissants ? Pour cette fois, Manuel Valls a perdu. La promesse sera au moins portée par Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, qui s’y sont déclarés favorables. Pour ce qui est du Parti socialiste, on en saura plus dimanche. Manuel Valls est officiellement contre, il préfère depuis longtemps la voie de la naturalisation, et ose à présent l’assumer. Benoît Hamon, de son côté, est pour. Il promet de soumettre la question au référendum après les législatives. Mais en réalité, la question a disparu. Lors du débat de mercredi entre les deux candidats à la primaire de gauche, personne ne l’a abordée. Hamon et Valls avaient cependant eu l’occasion de s’affronter sur le sujet, symbole de ce que peut être le reniement en politique, il y a près d’un an. C’était à l’Assemblée nationale, où Hamon avait déposé un amendement pour introduire le droit de vote dans le projet de loi « de protection de la Nation », qui voulait constitutionnaliser l’état d’urgence et la déchéance de nationalité.
En défendant son amendement, le 8 février 2016, Benoît Hamon rappelle aux députés que les électeurs se détournent des urnes. « C’est vrai partout en France, mais cela l’est particulièrement dans les quartiers populaires, où le vote n’est ni un rite, ni une habitude en raison de l’origine étrangère des parents. » Pour lui, le vote des étrangers est un moyen de « régénérer la démocratie française » et la marque d’une « appartenance à une même communauté de destin ». Les étrangers qui vivent régulièrement en France, note-t-il dans l’exposé sommaire de l’amendement, ont « les devoirs des autres citoyens, ils respectent la loi, travaillent, paient des impôts et des cotisations sociales ». Les majeurs étrangers non européens représentent aujourd’hui 3,5 % du corps électoral français, mais sont très concentrés sur les zones urbaines et périurbaines.

En réponse, Manuel Valls, encore chef du gouvernement, demande le rejet de l’amendement parce qu’il n’a rien à voir, selon lui, avec l’état d’urgence, et qu’il n’y a pas de majorité pour le vote de cette mesure.