Vinvin et Nono sont dans un bateau, lequel va rester, lequel va tomber à l’eau ? Bon, on ne va pas se mentir, le suspense n’est pas à son comble. Mais réjouissons-nous de ce que le monde des grands requins du business nous apporte : Jade Lagardère et Vincent Bolloré réunis dans un même épisode de L’empire. Il a fallu attendre le 138e pour que survienne cette incroyable conjonction entre deux des plus beaux astres des Jours : la superhéroïne de La cause du people et le supervilain de Canal+. Ce mardi 5 mai à 10 heures, pourtant, ni l’une ni l’autre ne seront présents physiquement à la réunion qui consacre ces noces inédites. Mais de l’issue de l’assemblée générale du groupe Lagardère va naître un mouvement d’ampleur : l’empire de Vincent Bolloré va boulotter l’empire d’Arnaud Lagardère. Ce n’est qu’une question de temps.
Le 21 avril, un communiqué de Vivendi a entériné l’invasion de Vincent Bolloré chez Arnaud Lagardère. Pendant que la France confinée s’échinait à fabriquer son pain maison, Vincent Bolloré s’est offert 10,98 % du groupe Lagardère et ce, avec l’argent de la maison-mère de Canal+ dont il n’est, après tout, que le premier actionnaire. C’est qu’il restait de la monnaie sur les 10 % d’Universal Music Group vendus 3 milliards d’euros au Chinois Tencent, même après distribution de juteux dividendes alors que les filiales de Vivendi bénéficient des aides de l’État (lire l’épisode 137, « Chez Bolloré, chômage et dessert pour les actionnaires »). « Il s’agit, assure le communiqué, d’un placement financier à long terme témoignant de la confiance de Vivendi dans les perspectives de ce groupe français. » Oui, oui, « la confiance »… Oui, oui, « les perspectives » de Lagardère, dont les deux principales ressources de flouze, Lagardère Travel Retail (les boutiques d’aéroports) et Lagardère Publishing (l’édition), sont totalement ravagées par le coronavirus… Limite, c’est une bonne action que fait là Vivendi, précisant que Lagardère « traverse, comme beaucoup d’autres, une période difficile ». On a failli écraser une larme, mais on s’est ravisé de peur que Vincent Bolloré ne fasse une OPA sur nos sanglots.
Bolloré rachetant un bout d’une boîte pour, finalement, la contrôler totalement : le schéma est connu comme le loup blanc breton, c’est d’ailleurs systématiquement sa façon de faire des affaires, d’Havas à Vivendi. Soit il gagne, comme il l’a fait avec Canal+, soit il gagne.