Stéphane Guy aurait adoré. Voir sa chaîne à lui, à laquelle il ne cessait de rendre hommage à l’antenne et dans les couloirs, ramasser ainsi l’exclusivité du championnat de première division de football pour des piécettes, le commentateur en aurait fait péter son micro de joie. Sauf que, viré pour crime de lèse-Bolloré (lire l’épisode 147, « Stéphane Guy viré : il y a main de Bolloré »), il ne bénéficiera jamais du véritable hold-up commis jeudi soir par Canal+. Pour 35 malheureux petits millions d’euros de plus, le groupe a en effet acquis l’intégralité et l’exclusivité de la Ligue 1
Donné et même offert, bradé, sacrifié, allez, allez, tout doit disparaître, je ne vous donne pas un, je ne vous donne pas deux, je vous donne 112 matchs, c’est 35 millions, c’est cadeau, ça me fait plaisir. Ainsi Vincent Labrune, le président de la Ligue de football professionnel (LFP), a-t-il topé avec Maxime Saada, président du directoire de Canal+, agissant dans l’ombre immense de son actionnaire Vincent Bolloré. Jusqu’à présent, Canal+ diffusait deux rencontres par journée de championnat moyennant 330 millions d’euros par saison, des droits que lui a sous-licenciés BeIn Sports après que le groupe est sorti de l’appel d’offres de 2018 une main devant, une main derrière, sans le moindre droit télé (lire l’épisode 95, « Canal+ : Bolloré n’en a plus rien à foot »). À la faveur de la faillite de Mediapro qui détenait tout le reste de la Ligue 1, matchs et magazines inclus, pour 780 millions d’euros, Canal+ récupère donc ses lots jusqu’à la fin de la saison. Soit 112 des 140 rencontres restantes, qui s’ajoutent aux 28 dont elle a déjà les droits. Pour 35 millions d’euros. Les 330 millions dont Canal+ s’acquitte valorise chaque match à 4,6 millions d’euros ; les 35 millions de rab chiffrent les rencontres à 312 500 euros l’unité. Une piécette, on vous disait. Moitié moins, à titre d’exemple, qu’un numéro de The Voice, le télécrochet de TF1.
Mais par quel miracle Canal+ a-t-elle réussi un tel hold-up ? Simple : elle avait son couteau posé sur la jugulaire du foot, à peine a-t-il suffi de faire perler une goutte de sang.