Le quatrième album du Français Rone est sorti en novembre. Il s’appelle Mirapolis, poursuit sa balade dans les grandes étendues électroniques et a déjà emmené son auteur à travers toute l’Europe : concerts complets à Paris, Amsterdam, Londres ou Berlin. Rone doit jouer au Zénith de Paris en juin avant d’attaquer les festivals de l’été en tête d’affiche. Bref, tout va très bien pour ce garçon discret. Mais lorsqu’il a fallu rendre Mirapolis visible dans les playlists des plateformes de streaming, là où se construit le monde musical d’aujourd’hui, Rone s’est heurté à quelques difficultés révélatrices de la façon de penser des plateformes.
C’est Idol, le distributeur de sa maison de disques InFiné, qui a représenté Rone auprès de Deezer et de Spotify. Pas de souci pour pousser Rone auprès des « éditos » de Deezer, les personnes qui sont chargées de choisir les titres qui vont entrer dans les multiples playlists (lire l’épisode 13 de la saison 1 de La fête du stream), qu’elles soient d’actualité, de nouveautés par style ou d’ambiance (lire l’épisode 13 de la saison 2 de La fête du stream). Plusieurs titres de Mirapolis se sont ainsi disséminés dans les playlists Nouveautés electro, Trajet du soir ou Sleep Sequence. Les morceaux y sont encore plusieurs mois après, ce qui garantit des dizaines de milliers d’écoutes mensuelles à l’album.

Mais chez Spotify, le travail a été bien plus compliqué. « On a galéré, m’a avoué Alexandre Cazac, le cofondateur d’InFiné. On a discuté avec la responsable des labels à New York, qui trouvait le disque super. Mais quand on est arrivés auprès des éditeurs France, ils n’ont jamais soutenu. » Le patron d’Idol, Pascal Bittard, le regrette aussi : « Rone, on a eu du mal à lui trouver une place dans les playlists. Ça ne rentrait pas dans les plus visibles, il ne trouvait pas sa place. On a des disques comme ça, qui sont de très bons albums mais partent avec des handicaps : un public un peu plus âgé, pas de tube… »
Et Pascal Bittard de comparer trois sorties récentes passées par Idol : les albums de Rone, de la chanteuse malienne Oumou Sangaré et du rappeur skateur Lomepal. « Il y a dix ans, on aurait pu les comparer en termes de ventes, mais là, Lomepal explose les autres. Il va finir double platine, et à 80 % sur le stream ! Rien n’est jamais facile, mais on ne va pas se mentir, un disque comme ça, c’est du beurre, parce que c’est ce qui marche en premier auprès des plateformes de streaming. »
C’est-à-dire que Lomepal propose un rap branché qui connecte tout de suite avec le streaming et les auditeurs qui y font la loi par leurs écoutes boulimiques – les 12-25 ans.