Deezer est enfin prêt à appuyer sur le bouton pour révolutionner la répartition des revenus des artistes sur sa plateforme de streaming, qui crée aujourd’hui de grandes inégalités, et ainsi faire entrer l’économie de la musique en ligne dans une nouvelle ère qui remettrait le fan au centre des carrières. C’est beau dit comme ça, hein ? On dirait le début d’un film de Cédric Klapisch. En vrai, ce n’est pas encore pour demain mais peut-être pour début 2020 selon Deezer, au minimum en France et pourquoi pas dans le monde entier. Le temps de finir de convaincre tous les acteurs de l’industrie de la musique. Pour cela, le leader du secteur a lancé ce mercredi une vaste opération médiatique, notamment un site qui doit permettre à chacun de mesurer les défauts du système actuel de rémunération des artistes et de comprendre la transformation proposée par Deezer.
Bruit de vinyle qui s’arrête d’un coup comme dans Cash investigation, et petit retour en arrière avec une voix super concernée. Depuis leur lancement en 2007, les plateformes de streaming utilisent toutes la même mécanique comptable pour répartir l’argent entre les artistes : le modèle dit du prorata, directement hérité de la publicité. C’était le plus maîtrisé et le plus simple techniquement à cette époque. Dans le prorata, une plateforme prend tout l’argent gagné sur un mois donné, en retranche sa part (environ 30 %) et celle qui va aux éditeurs, auteurs et compositeurs (environ 15 %, via la Sacem), puis reverse le reste aux artistes via leur maison de disques. Désormais, pour faire court, les artistes les plus écoutés recevront une part du gâteau proportionnelle à leur part dans les écoutes. Si Ed Sheeran a représenté 25 % des écoutes sur Deezer en juin dernier (le chiffre est faux, rassurez-vous), il recevra 25 % de l’argent que la plateforme distribue aux artistes pour ce mois.

Logique ? Oui, mais ce système a d’importants effets de bord que les dernières années ont mis au jour. Tout d’abord, il donne une importante prime aux vainqueurs tout en diminuant les revenus potentiels des artistes qui n’ont pas un grand auditoire. Car au jeu du prorata, votre abonnement à un service de streaming sert souvent à payer des artistes que vous n’écoutez pas mais que la majorité écoute. Inversement, si vous êtes pris de passion pour le nouvel album super underground de Tenesha The WordSmith (vous devriez) et que vous l’écoutez en boucle, il y a peu de chance qu’elle touche beaucoup d’argent.