Ça alors, un groupe français dont l’État possède 33 % du capital aurait des pratiques fiscales aussi condamnables qu’Apple ou Google ? Il y a dix jours, la Commission européenne a annoncé avoir ouvert une enquête approfondie sur le traitement fiscal accordé par le Luxembourg à Engie. Plusieurs filiales de l’ex-GDF Suez n’auraient pas payé d’impôts en bénéficiant d’une « décision fiscale anticipative », c’est-à-dire d’un ruling – l’objet du scandale LuxLeaks. Et que croyez-vous qu’il arriva suite à cette information ? Rien. Pas de cris outragés de politiques, aucun débat sur la stratégie fiscale des groupes étatiques. Comme si le discours des pouvoirs publics contre l’évasion fiscale des multinationales américaines avait tellement formaté les esprits qu’il semblait inconcevable qu’une société française comptant plusieurs représentants de l’État à son conseil d’administration puisse agir de même.
Et pourtant, dans cette affaire, Engie n’est pas accusée par hasard. Quatre filiales sont concernées par l’enquête de la Commission : GDF Suez LNG (Luxembourg), GDF Suez LNG Supply, Electrabel Invest Luxembourg et GDF Suez Treasury Management. Mais les détails des montages épinglés par Bruxelles, tels que nous les avons reconstitués, montrent une créativité certaine. Et on peut parier que la multinationale de l’énergie ne s’est pas arrêtée là.