Ce 23 avril 2020, alors que le monde s’est replié sur lui-même, ployant sous les assauts du Covid-19, Anwar Raslan va s’avancer vers ses juges. Un peu plus d’un an après son arrestation, le 13 février 2019, le procès du colonel syrien, accusé de complicité de crimes contre l’humanité (lire l’épisode 1, « À la recherche d’Anwar Raslan, tortionnaire syrien »), débute au tribunal de Coblence, en Allemagne. Dans les mois à venir, se succéderont à la barre les témoins et victimes de faits commis à des milliers de kilomètres du lieu où leur auteur présumé sera jugé. Mais face aux crimes contre l’humanité, la justice n’a pas de frontières. C’est en tout cas le principe de la « compétence universelle », concept juridique sur la base duquel des dizaines d’enquêtes sur des exactions syriennes ont été lancées par les justices européennes.
« La compétence universelle repose sur un grand principe : nul pays ne doit être un refuge pour ceux qui auraient commis les crimes les plus graves », explique aux Jours la vice-procureure Aurélia Devos. Dans les hautes tours de la cité de la justice à Paris, à deux enjambées du périphérique, cette magistrate dirige le pôle « crimes contre l’humanité, crimes et délits de guerre » au sein du parquet national antiterroriste, créé en 2012.