La classe de seconde Production conception mécanique (PCM) du lycée de Fontaineroux travaille en silence. Xavier Seguin, le prof de français, vient de projeter sur le tableau blanc les définitions de certains mots : « fantasque », « gambade »… Une main se lève. « Monsieur, ça veut dire quoi “perclus” ? » Ce lundi, les dix-sept élèves ont une heure et demie d’interro. Ils doivent répondre à des questions de compréhension et rédiger une petite « expression écrite », dix à douze lignes. « Il n’est pas question, comme la dernière fois, que certains n’écrivent rien », prévient l’enseignant. Nicolas R. proteste bruyamment, pas certain d’arriver à écrire son texte. « Tu essayes, Nicolas. Cinq lignes, mais pas rien. »
De son bureau, le prof aperçoit un élève s’assoupir au fond de la classe. Il s’approche et l’interroge doucement : « Qu’est-ce que tu as ? » Aïssa réclame quelques minutes de sommeil supplémentaires puis, promis, il va s’y mettre. « Soit tu vas à l’infirmerie, soit tu te mets au travail, Aïssa. »
Six élèves passent également une interrogation orale de quelques minutes. Il s’agit de présenter un personnage de leur choix, fictif ou réel. La consigne, donnée par l’enseignant la semaine précédente, précisait quand même « pas quelqu’un de la classe ». Nicolas L., consciencieux, a réfléchi longuement avant de choisir Yuno Gasai, une héroïne de manga qu’il aime beaucoup, parce qu’elle est « marrante » et violente. « Elle tue et elle est marrante ? », s’enquiert Xavier Seguin. « C’est le manga qui est marrant. »
Fan de foot, Guillaume, en jogging noir à bandes vertes, a décidé de décrire Layvin Kurzawa, latéral gauche au PSG, dont il est fan, même « si c’est pas un héros comme Griezmann ». Dans le fond, les élèves s’agitent et Nicolas R. profite du bruit pour changer de place en faisant crisser sa chaise. L’enseignant les laisse faire un instant avant de leur demander s’ils ont déjà vu le film Le gendarme se marie. « Quand un personnage passe un examen et que son ami passe son temps à taper avec un stylo sur sa table ? Vous voyez ? Alors arrêtez de déranger vos camarades. »

À Bruno, qui n’a pas rien préparé et ne pense à aucun personnage en particulier, Xavier Seguin propose de décrire Jean Valjean. L’adolescent se souvient des cours précédents (lire l’épisode 9, « Jean Valjean chez les seconde pro ») : « Jean Valjean, c’est le bagnard sale avec une barbe, celui qui a volé du pain et qui se planque. »
« Il y a un mec…
Un mec ?
Pardon, un monsieur qui s’appelle Fauchelevent… »
Bruno décroche un 6,5/10. Il sourit.