Midi vingt-cinq, les cours reprennent pour les élèves qui sortent de la cantine. Mais le lundi, c’est une heure creuse pour la seconde Production conception mécanique (PCM). Près du portail, les surveillants répètent les mêmes mots : « Carnet ! » quand les élèves sortent du lycée, « Capuche ! » quand ils rentrent – pour rappeler aux nombreux jeunes qui l’oublient que le port de la capuche est interdit dans le lycée. « Carnet », c’est pour exiger de voir le dos du carnet de correspondance. Lorsqu’un A majuscule y est inscrit, ça signifie que les parents de l’élève l’autorisent à sortir de l’établissement pendant la récréation et les heures creuses. Si l’élève oublie son carnet, il ne franchit pas le portail. « Mais vous savez très bien que j’ai une autorisation », a tenté d’argumenter (en vain) Alexis pendant une récréation.
Damien L., Ribeiro, Kalvin, Guillaume et Bruno ont tous un grand A au dos de leur carnet. On les retrouve dehors, assis sur un banc en bois près du parking du lycée. À part Damien qui a posé le sien par terre, les autres gardent leur sac sur le dos. Ribeiro a mis le haut-parleur de son portable. Ils écoutent Nekfeu. « Ça vient de “fennec”, un animal qui pue », explique Kalvin, qui regrette que sa musique soit devenue trop commerciale. « Il veut plaire à tout le monde. »

À l’extérieur du lycée, pendant les heures creuses, les élèves n’ont pas de lieu à s’approprier, ni magasin, ni café, ni cinéma. Dans le hameau de Fontaineroux, il n’y a que les clairières et l’abribus, points de ralliement de ceux qui veulent se soustraire au regard des adultes. Une grande fresque murale, peinte dans la cour de récréation par un ancien élève, représente un désert avec cactus, cheval et cow-boy. Comme une allégorie du lycée planté au milieu de rien. « Il a représenté le désert de Fontaineroux », sourit la proviseure-adjointe. Le bus ne s’arrêtant que deux fois par jour devant le lycée – le matin à l’ouverture des portes et en fin de journée, à 17h25 –, Mme Clérin a conçu les emplois du temps de façon à ce que les élèves aient le minimum de trous. « Les emplois du temps (EDT) en lycée pro sont complexes à élaborer. Les cours d’EPS sont positionnés en premier puis les ateliers (50 % de l’EDT). Ensuite, je place les cours d’enseignement général. On évite les trous et on les libère plus tôt le vendredi après-midi. Les trous existent malgré tout quand les élèves sont en groupe en maths et en sciences. »
Ce qui serait bien, c’est un camion-pizza. Un camion-pizza qui viendrait une fois par semaine, là, sur le parking.
Sur le parking, les garçons regardent avec envie les BTS, plus vieux, grimper dans leurs voitures pour aller manger des kebabs chez le grec du coin – inaccessible à pied.