«We win together, we lose together... » Ainsi parle Toby Ziegler, le dircom de la série mythique À la Maison-Blanche (The West Wing, en VO) devant son staff, au moment de rappeler à l’ordre et de ressouder les troupes après d’inopportunes fuites dans la presse. La tirade lyrique du conseiller du président des États-Unis chute sur une petite musique qui met la larme à l’œil. Lorsque nous avons démarré la saison 1 de cette série, l’un de nos interlocuteurs nous l’a assuré : « Toute l’équipe de Macron à l’Élysée est biberonnée à The West Wing. Ils en connaissent les répliques par cœur. » Sauf qu’aujourd’hui la scène provoquerait sans doute quelques rires jaunes parmi les fidèles du chef de l’État. L’équipe de la campagne présidentielle, arrivée triomphante à l’Élysée sur tapis rouge en mai 2017 (lire l’épisode 21 de l’obsession Les communicants), se délite jour après jour. L’heure est plutôt à la lose – mais séparément, en quittant les lieux un par un. Et au grand remaniement des conseillers usés par dix-huit mois de pouvoir.

La petite bande des fidèles du Président s’était surnommée « Les mormons » pour signifier leur très grand dévouement à Emmanuel Macron – nom qui soulignait aussi, disaient les mauvaises langues, leur fort penchant à l’entre-soi et leur cruel manque d’humour. Le plus emblématique d’entre eux – et non moins discret – s’apprête à faire ses cartons. Ismaël Emelien, conseiller spécial du chef de l’État, stratège du mouvement En marche et de la conquête du pouvoir, a rencontré Emmanuel Macron il y a dix ans et travaillait à ses côtés depuis 2012. En janvier, il avait pris des vacances, en dépit des grandes manœuvres de réorganisation à l’Élysée. Il a annoncé son départ ce lundi 11 février, via Le Point. L’hebdomadaire relaye le storytelling officiel : tout était calé avec Emmanuel Macron depuis la mi-novembre, en vue de la sortie en mars prochain du livre d’Ismaël Emelien sur « le progressisme », coécrit avec autre conseiller lui aussi partant, David Amiel…
Dans Le Point, l’affaire Benalla est rapidement évoquée, en deux lignes. Elle pèse pourtant très lourd, pour le pouvoir en général depuis l’été dernier, et dans le départ du conseiller spécial en particulier. Ismaël Emelien est soupçonné par les enquêteurs d’avoir détenu le CD contenant les images des violences du 1er mai 2018, place de la Contrescarpe à Paris, obtenues illégalement de la préfecture de police de Paris.