Col de chemise ouvert et décontraction de circonstance. En ce dimanche 1er décembre, Édouard Philippe s’avance vers le perron de Matignon, une main dans la poche, l’autre tenant un dossier sous le bras – comprendre, en langage ultracodé de la com politique, le Premier ministre est au travail –, d’un pas qui surjoue la légèreté et la bonne humeur. Son visage et ses traits tirés montrent le contraire. Il salue rapidement les journalistes massés dans la cour et remercie les micros tendus, soudain plus chaleureux qu’à l’accoutumée. À l’extérieur gronde une colère sourde. Dans quatre jours, la France va connaître un large mouvement de grève, secteurs public et privé confondus, qui promet de durer au moins plusieurs jours. Les protestataires contre la réforme des retraites défileront ce jeudi, puis les gilets jaunes rejoindront le mouvement ce samedi. La défiance va, une nouvelle fois, s’exprimer massivement dans la rue. De quoi donner des sueurs froides à un pouvoir qui vacilla il y a tout juste un an, face à une révolte qu’il n’avait pas vue venir (lire l’épisode 1, « Dans les coulisses d’un pouvoir en crise »). Pour se préparer, cette fois, Édouard Philippe a réuni ses ministres dans un séminaire en forme de veillée d’armes. En ce dimanche ensoleillé, son sourire crispé semble vouloir dire « tout va bien et nous ne sommes pas inquiets » ou encore « la situation est sous contrôle ». Scoop : le pouvoir, en réalité, ne maîtrise pas grand-chose.
Premier écueil pour l’exécutif, le pouvoir lui-même est divisé.