À l’heure du bilan de fin de mandat au Medef, le Mouvement des entreprises de France, l’incontournable question tombe, comme un couperet : retiendra-t-on autre chose de la présidence de Pierre Gattaz qu’un simple pin’s ? En ce 3 juillet, jour d’élection du nouveau patron des patrons, qui voit s’affronter Geoffroy Roux de Bézieux, vice-président de l’organisation, et Alexandre Saubot, responsable de son pôle social, il reste quelques heures pour rassembler ses plus beaux souvenirs. Le test est assez simple, posez la question autour de vous et vous obtiendrez une réponse récurrente : mais oui, le pin’s…
Plus de vingt ans après ses heures de gloire, l’épinglette est revenue en grâce chez les patrons. Au lendemain de son élection, en juillet 2013, Pierre Gattaz l’arbore fièrement au revers de son veston, et ne la quitte plus lors de ses apparitions publiques. En lettres noires sur fond jaune, elle formule une promesse : « 1 million d’emplois ». Le chiffre a été calculé au doigt mouillé avec son conseiller en communication, Matthias Leridon, le patron de l’agence Tilder. L’objectif ? Faire pression sur le gouvernement pour obtenir des baisses de charges, contre des promesses de créations de postes – mais sans contreparties précises, un chiffre global et rien d’autre. Quelques mois plus tard, le « pacte de responsabilité » présenté par François Hollande lors de ses vœux pour 2014 entérine ce donnant-donnant qui sent l’opération de com à plein nez.

Le lobbying patronal a très bien fonctionné. Il fut appuyé et relayé par un jeune conseiller, le secrétaire général adjoint de l’Élysée d’alors, un certain Emmanuel Macron, qui a joué les intermédiaires entre François Hollande et le syndicat patronal. Ce succès est pourtant en trompe-l’œil. Le Medef a certes de l’influence, mais en ce début de quinquennat socialiste, le pouvoir politique s’est autant tourné vers lui que l’inverse. Face aux difficultés économiques et au chômage persistant, l’Élysée et Matignon ont cherché à se rapprocher des chefs d’entreprise, échaudés par la taxation à 75 % des très hauts revenus annoncée après l’élection de François Hollande. Et à Bercy, le ministre de l’Économie de l’époque, Pierre Moscovici, est plus un adepte de la politique de l’offre que de la demande. Les obstacles pour convaincre l’exécutif ont été levés sans grand effort.
La suite de l’histoire confirmera ces orientations très « pro-business », avec l’arrivée d’Emmanuel Macron à Bercy, puis son élection à la présidence de la République.