Derrière son écran, Abu Mujahid profite du wifi d’un cybercafé de Mossoul, deuxième ville d’Irak, occupée par l’État islamique (EI) depuis juin 2014. Durant cet été 2016, l’euphorie jihadiste est terminée. La pression militaire est de moins en moins tenable. Les défaites s’accumulent. Ses bastions tombent les uns après les autres. Les forces irakiennes et leurs alliés, soutenus par les raids de la coalition internationale, sont aux portes de la ville, quasiment assiégée. Cela ne semble pas inquiéter outre mesure ce Français. Au calme, il vient de se commander un smoothie melon-pastèque au coin de la rue. Sur sa photo de profil WhatsApp, la messagerie sur laquelle nous menons des entretiens pendant un mois, il pose crânement avec une large casquette à visière plate, enfoncée jusqu’au bas du front. La snapback hip-hop noire est frappée de l’insigne blanc que l’État islamique s’est approprié : le sceau du Prophète. Il ne représente plus son département, son crew ou son quartier mais l’État islamique. Sa vie d’avant a laissé des traces, indélébiles.
« Je suis un simple soldat », dit-il, tout en se présentant aussi comme un imam.