Lorsque Quentin arrive en Syrie et poste son premier selfie en kalachnikov sur sa page Facebook, il n’a que 16 ans. « Quand on est partis, on pensait que c’était bien ce qu’on faisait. » Quentin est parti en novembre 2013 avec son frère dans le sillage du Niçois Omar Diaby, dit Omar Omsen, figure française du recrutement de jihadistes et star de la jihadosphère francophone (lire l’épisode précédent, « Quentin, ado jihadiste de la filière niçoise »). Ils l’ont rencontré au pied des barres de leur quartier. Les deux frères ont grandi dans un milieu paupérisé. L’année de son départ, Quentin est élève en CAP et travaille comme vendeur, le week-end, dans un petit magasin de Nice. Sans antécédent judiciaire, il est inconnu de la police, force un peu sur la fumette mais n’a jamais trempé dans la délinquance. Son père, né en Tunisie, musulman pratiquant, leur a prodigué, à lui et son frère, une éducation religieuse mais a tenu à leur donner des prénoms occidentaux pour faciliter leur intégration dans la société française. Un homme à la personnalité écrasante qui se déplace dans les rues de Nice sur sa vieille mobylette et vit du RSA, avec une santé fragile. Leur mère, Française de confession chrétienne, ne travaille pas non plus. Très dégradée physiquement, jusqu’à avoir des difficultés à s’exprimer, elle souffre depuis la naissance de Quentin d’une grave maladie, difficile à assumer socialement.
Déjà vulnérables, les parents sont dévastés par le départ de leurs deux fils en Syrie.