Agnès Buzyn, femme d’influence. Selon le palmarès établi par l’Argus de la presse, la ministre de la Santé a été la femme politique la plus citée dans les médias au premier trimestre 2018, juste devant la maire de Paris, Anne Hidalgo. Ses sujets de prédilection depuis le début de l’année ? Hausse du prix du tabac, réforme de l’hôpital public et des EHPAD, affaire Lactalis… De la crise du Levothyrox, il fut (très) peu question dans les interventions de la ministre ces dernières semaines, alors que ce médicament concerne trois millions de malades de la thyroïde en France. Lors de sa récente interview sur BFMTV et RMC, le 12 avril dernier, la ministre de la Santé n’a accordé que quelques secondes au sujet. Déjà classé ou presque, déjà du passé. Pourtant, la décision de changer la formule de ce médicament sensible, en situation de monopole en France il y a encore un an, avec une information très insuffisante, est elle-même contestée (lire l’épisode 1, « Levothyrox, la crise sanitaire qui ne dit pas son nom »). Ces très modestes interventions médiatiques sont symptomatiques : le ministère de la Santé semble aujourd’hui considérer le problème comme réglé. « À la rentrée 2017, la priorité de la ministre a été d’organiser l’arrivée de nouveaux produits sur le marché pour apporter des alternatives aux patients souffrant de la nouvelle formule. Cinq nouveaux médicaments sont aujourd’hui commercialisés. Un temps d’adaptation sera encore nécessaire pour certains, mais une offre diversifiée est maintenant disponible », insiste-t-on dans son entourage.
Pendant ce temps, les malades qui ont souffert de la nouvelle formule, après son arrivée en France à partir de mars 2017 (lire l’épisode 2, « “J’étais tellement mal que j’avais envie d’en finir” »), sont toujours nombreux à se fournir en ancienne formule dans les pays frontaliers : Belgique, Luxembourg, Allemagne, Italie, Espagne… « Ce n’est pas une solution pérenne car le laboratoire a prévu d’étendre la nouvelle formule à toute l’Europe », rétorque-t-on à la direction générale de la santé. Mais les malades qui ont subi des effets secondaires ne veulent pas « switcher » à nouveau. « Ce fut trop douloureux l’année dernière. Je resterai le plus longtemps possible à l’ancienne formule. Jusqu’ici, j’ai réussi à obtenir des boîtes en Suisse via des amis mais je vais devoir trouver d’autres solutions à l’avenir… », s’inquiète ainsi cette malade parisienne de 56 ans.