Ce sont les dernières heures. Caterina Avanza a les traits tirés. Elle a derrière elle plusieurs mois de campagne : tractage le matin avant d’aller bosser, marchés, mais aussi animations diverses et variées (comme les « kiosques », ces arbres à ballons multicolores qui servent à distribuer les programmes), porte-à-porte… Plusieurs militants d’Emmanuel Macron ont rendez-vous à 18h30 ce jeudi soir dans un bar de la rue Oberkampf, dans le XIe arrondissement de Paris, pour l’une des dernières actions avant la suspension de la campagne, vendredi à 23h59. Depuis un mois, ils ont entamé des opérations de porte-à-porte hebdomadaires ; elles sont quotidiennes depuis deux semaines. En tout, dans cet arrondissement qui vote à gauche, les sympathisants d’En marche ont frappé à 4 500 portes et un tiers leur ont été ouvertes, me glisse Pierre-Xavier Féron, un avocat de 34 ans, l’un des coordinateurs, avant d’enfiler un tee-shirt jaune siglé Macron. Au Mecano Bar, ils se répartissent par deux : chaque tandem a des adresses spécifiques dans le quartier. Il faut aller à la rencontre des indécis. À trois jours du scrutin, ils sont encore nombreux.
Dans un immeuble bien entretenu, escalier large et petites tomettes au sol. Un trentenaire en sweat-shirt à capuche gris clair ouvre à Caterina Avanza et Pierre-Xavier Féron. Les échanges sont cordiaux. Le jeune homme fait partie des hésitants.
« Vous entendez des choses positives sur Emmanuel Macron ?
Pas que. »
Pierre-Xavier ne se démonte pas : « Il y a des choses qui vous intéressent dans son programme ? »
Pour alimenter la conversation, la plupart du temps, les militants d’En marche parlent d’eux, de leur parcours. Pierre-Xavier a fait Erasmus, Caterina est franco-italienne et farouchement européenne. Ils enchaînent assez naturellement sur le sujet. Et dessinent le portrait d’un candidat plus engagé que les autres, partisan d’un budget de la zone euro et d’une défense commune. Sur le seuil de son appartement, le jeune homme se renseigne, répond. « La défense européenne, ça ne se fera jamais. Chacun veut garder son pré carré… » « L’Europe, l’harmonisation fiscale, c’est le seul qui en parle », plaide aussi Caterina. « Hamon aussi ! », objecte-t-il. Le jeune homme repousse son chat tenté par une fugue. Il ne met pas fin de lui-même à l’échange, espérant peut-être être convaincu. Pour lui, Pierre-Xavier, qui tient le compte des échanges sur des fiches, cochera la case « indécis ».
Dans l’immeuble, beaucoup répondent avec honnêteté mais sans certitude : « Je vote mais je ne sais pas pour qui. » Dans ces cas-là, les deux militants d’En marche s’accrochent, essayant d’éveiller l’intérêt, voire l’adhésion.