Voilà plusieurs mois que je suis partie explorer la planète Marche, cet objet politique inédit et mouvant, créé par Emmanuel Macron en avril 2016. De l’extérieur, on en décrit parfois les militants comme les adeptes d’une secte d’un genre nouveau. Eux ne veulent pas être pris pour des dévots, attirés et domptés par un gourou au regard clair. Non, ils n’ont « pas le culte de la personnalité », m’expliquent plusieurs bénévoles. Mais ils confient également qu’ils sont « admiratifs » ou même « subjugués » par leur candidat. Pourquoi l’ont-ils rejoint ? Sur quoi se base leur foi en un « renouveau » ? « Il n’y a pas de garantie qu’il soit différent des autres », reconnaît Maria Paz Usach Fave, militante active à Dijon, 49 ans et professeure d’espagnol. Néophytes en politique pour la plupart, comme elle, ils sont sortis de leur ornière confortable ou de leur indifférence feinte ; ils se sont lancés : ils y croient. Ils revendiquent à tout bout de champ « la bienveillance » qui ne caractérise pas exactement le monde politique, particulièrement violent. Cela les tient éloignés du cynisme dont ils se montrent incapables.
À les observer minutieusement, je constate tous les jours qu’ils conservent ce qui, chez beaucoup de citoyens, s’est abîmé, voire perdu, ces dernières années : la confiance. C’est peut-être l’atout des nouveaux venus en politique dont l’incursion, récente, les protège de l’usure. Cette confiance est devenue à notre époque plutôt rare et peu partagée, un luxe probablement. Ces militants se servent d’Emmanuel Macron pour contourner la déception que les politiques leur inspirent. Ils la convertissent en carburant, en huile à transformer une société à bout de souffle. Pour cela, ils se fient à un homme qu’ils connaissent peu. Un candidat qui se définit comme « un homme du “pour” », et dont les troupes scandent « Pour ! Pour ! Pour ! » dans les meetings, comme s’il suffisait de le dire pour anéantir les « contre ». La confiance, Emmanuel Macron lui-même la malaxe, la valorise, la convoque, de discours en discours. « Dimanche prochain ouvre le grand combat de la volonté contre le renoncement, de l’optimisme contre la nostalgie trompeuse, de la transformation profonde contre l’immobilisme ou la restauration », a-t-il martelé à Bercy, lundi de Pâques, parlant aussi de « foi et d’optimisme » quand d’autres font campagne sur les dangers et le repli.
Beaucoup de ses néo-militants sont attirés par la promesse de mettre fin aux clivages entre la droite et la gauche, l’un des leitmotivs de Macron.