Griveaux a un problème d’élection

Griveaux démission ! C’est d’ordinaire à Anne Hidalgo que le Parisien mécontent lance cette injonction, mais le candidat de La République en marche (LREM) a réussi, c’est rare, à prendre les devants sur la maire de Paris. Ce vendredi matin, Benjamin Griveaux a annoncé qu’il abandonnait la course à la capitale. Il nous faut peser les mots, éviter le « Griveaux se retire », chasser le bon mot ou le calembour graveleux et essayer d’être le plus sobre possible pour dire la chose : Benjamin Griveaux a laissé tomber les municipales à Paris après la diffusion de vidéos masturbatoires.

Déjà, dit comme ça, on a bien conscience que c’est étrange. Mais attendez un peu : c’est un artiste, ou bien un activiste, russe, un certain Piotr Pavlenski, qui a mis en ligne ces vidéos. Celui-ci dit les tenir, a-t-il expliqué à Libération, « d’une “source” qui avait une relation consentie avec Benjamin Griveaux ». Ce Pavlenski entendait ainsi confondre un Griveaux qui, écrit-il sur son site, « promeut un puritanisme que lui-même méprise » – oui, nous aussi, ça nous avait échappé. Et c’est un ancien député LREM, le zinzin Joachim Son-Forget, qui a largement contribué à les populariser en publiant ce jeudi sur Twitter le lien vers le site délictueux en feignant de s’en indigner (histoire de ne pas embrouiller l’affaire, passons sur le fait que Joachim Son-Forget a annoncé cette semaine chez Cyril Hanouna sa candidature à la prochaine élection présidentielle). Tandis que, ce jeudi soir, Mediapart dépubliait fissa un post de blog reprenant lesdites vidéos. Et le tout pourrait être du « revenge porn » : les vidéos sont accompagnées d’échanges de messages intimes entre une femme et un homme, ce dernier étant présenté comme Benjamin Griveaux. Mais rien n’identifie formellement le candidat macroniste dans ces vidéos, où l’on ne voit qu’un sexe anonyme.

Ça fait beaucoup, on est d’accord. Rappelons à toutes fins utiles qu’il n’est pas interdit de se filmer dans le plus simple appareil, ni de partager son œuvre avec un adulte consentant, et ce même si on a dans la vie pour objectif d’être élu maire de Paris. Rappelons en revanche qu’il est tout à fait interdit de diffuser de telles vidéos sans l’accord des personnes qui y figurent. L’addition, c’est deux ans de prison et 60 000 euros d’amende, dit le Code pénal dans son article 226-2-1.

Mais voilà, le résultat est là : ce vendredi matin, Benjamin Griveaux, en annonçant dans une vidéo renoncer à la mairie de Paris, a dénoncé « des attaques ignobles mettant en cause [s]a vie privée » : « Je ne souhaite pas nous exposer davantage, ma famille et moi, quand tous les coups sont désormais permis, cela va trop loin. C’est pourquoi j’ai décidé de retirer ma candidature à l’élection municipale parisienne. Cette décision me coûte, mais mes priorités sont claires, c’est d’abord ma famille. » Notons que Benjamin Griveaux se garde bien de démentir être la personne sur les vidéos.