C’est dans une salle assiégée par les eaux de la Seine en crue, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), que se tiennent ce vendredi soir les 36e Victoires de la musique, sans public et la boule au ventre malgré les sourires de façade. Car les musiciens et les techniciens présents représentent toute une profession à l’arrêt depuis le 29 octobre, après une année 2020 déjà vécue en pointillés assassins pour le moral et les finances.
C’est pour aller contre cette ambiance pesante que l’organisation des Victoires avait proposé de faire de cette cérémonie une expérience scientifique chargée de prouver, une fois de plus, que certains concerts pourraient se tenir dans le respect d’un protocole sanitaire strict. Il s’agissait d’accueillir 1 300 personnes volontaires, non-fragiles, de les tester quatre heures avant la cérémonie (assise et distanciée) puis à nouveau cinq jours après, à l’aide d’un test d’un nouveau genre proposé par le laboratoire américain Innova. Quand les tests actuels mesurent la charge virale, celui d’Innova cherche la contagiosité : quelques tours de goupillon dans chaque narine et non pas jusqu’au fond de la paroi nasale comme le nécessitent aujourd’hui ceux réalisés en pharmacie, puis un résultat en vingt minutes. Le test est carrément fait pour pouvoir être réalisé par tout un chacun, pas plus compliqué qu’un test de grossesse et avec, selon Innova, une fiabilité à 96,5 %. La préfecture de police de Paris n’a finalement pas autorisé cette expérimentation très médiatique lors de la principale fenêtre d’exposition de la musique à la télévision, mais ce n’est pas le plus important. Car cette histoire d’autotests révèle la grande bataille qui va se jouer dans les semaines à venir dans le secteur de la musique pour espérer la tenue des festivals de l’été et préparer la réouverture des salles. Essayer de trouver une solution, alors que mercredi, l’annulation de Solidays, qui devait se tenir fin juin près de Paris, a encore accentué la peur d’une grande glissade générale.
On demande à pouvoir ouvrir en jauge debout sans distanciation, pour conserver l’esprit. Si, pour pouvoir faire ça, la seule solution c’est de demander un test ou une preuve de vaccination à l’entrée du festival, moi je prends.
Tout va vite s’accélérer, puisque le 18 février, jeudi prochain, une grande réunion doit se tenir au ministère de la Culture avec les festivals où « on espère des réponses », résume sobrement Jean-Paul Roland, directeur des Eurockéennes de Belfort et l’un des principaux activistes sur le front du redémarrage du secteur avec la fédération DeConcert! et le syndicat Prodiss, la voix des principaux acteurs privés.