Il s’en va… Le voilà, séduisant trublion d’un système politique qu’il prétend renverser. Au-delà de ses idées, saluons une prouesse. En quatre ans à peine, l’anonyme énarque, inspecteur des finances défroqué pour les délices de la banque d’affaires Rothschild, a imposé son nom comme on réussit un lancement de marque dans un milieu hyper concurrentiel. Dans la foulée, il a créé en avril dernier sa boutique au nom dépolitisé (En marche !) et affole désormais le vieux monde
, selon son expression, corseté par des institutions, des partis et des codes anachroniques. Pas mal.
Avec sa démission du ministère de l’Économie, Emmanuel Macron, 38 ans, joue tapis. Sans rien n’avoir d’autre à perdre que quelques mois de sursis dans les stratosphères de Bercy et l’usage de la vedette fluviale qui l’a transporté à l’Élysée pour un entretien avec François Hollande en ce jour de départ. Pour le président de la République en revanche, le calvaire se poursuit et l’histoire se répète. C’est lui qui avait imposé son ancien secrétaire général adjoint à la place du fracassant démissionnaire Arnaud Montebourg il y a deux ans. Valeur sûre du palais présidentiel, le fidèle Michel Sapin, ministre des Finances, a récupéré mardi au débotté le portefeuille du partant.
Pour Macron, quitter le gouvernement signifie, de fait, être candidat à l’élection présidentielle. Il laisse ainsi entendre que François Hollande sera trop faible pour oser même se présenter et qu’en tout état de cause, ses chances de l’emporter en 2017 sont nulles. Le roi est déjà mort… action ! Mardi, expliquant les raisons de sa démission depuis Bercy sur un rare fond bleu présidentiel, il a pointé les limites de notre système politique
et fustigé l’impuissance collective
de ses acteurs. Libre de ses mouvements et sans comptes aucun à rendre à un parti, l’ex-banquier préempte au passage l’espace politique d’un rival potentiel et honni sur le créneau iconoclaste : Manuel Valls.
Les ovnis crédibles sont rares dans le ciel politique français. Macron en est un. Sur fond de défiance absolue envers la politique, il fonce avec l’idée que le fruit est mûr. Que les Français, sidérés par le décalage avec eux de la classe politique dans son ensemble, sont prêts à l’audace, prêts à rompre avec les clivages d’hier. Et donc à se tourner vers lui plutôt que vers les sempiternelles badernes Juppé, Hollande, Sarkozy, Le Pen, Mélenchon et consorts, embourbés dans leurs échecs et leurs discours inaudibles.