Vanessa Jérôme, chercheuse associée à l’université de Victoria, au Canada, spécialiste du parti écologiste français, analyse les résultats du second tour de la primaire écologiste, dont l’eurodéputé Yannick Jadot est sorti vainqueur contre l’économiste Sandrine Rousseau.
Quelle lecture faites-vous du score très serré du second tour de cette primaire écologiste ?
Vanessa Jérôme : Le score est serré mais pas tant que ça dans l’histoire des écologistes. Il y a eu d’autres primaires où il l’était bien plus. À l’occasion de celle de 2006, Dominique Voynet n’a finalement gagné contre Yves Cochet qu’avec 57 voix d’écart. Les 2 112 voix qui séparent Yannick Jadot de Sandrine Rousseau ne sont pas beaucoup pour l’ordre du monde, mais pour les écologistes, c’est une victoire. Ce qui donne cette impression de score très serré, c’est que 51,3 % n’est pas le score espéré par Yannick Jadot et ses équipes, ni même celui anticipé par les commentateurs. C’est surtout un score qui n’est pas assez flagrant pour éteindre complètement les questions sur sa légitimité et sur la manière dont il portera ensuite la campagne des écologistes.
Au soir des résultats, les cadres d’EELV se réjouissaient d’une répartition des voix qui n’humiliait personne et permettait de travailler ensemble. Qu’en pensez-vous ?
Les écologistes luttent toujours contre l’image d’Épinal du parti coupeur de têtes et divisé. C’est d’autant plus important que les écologistes prétendent cette fois réellement s’inscrire dans la course présidentielle. Affirmer que le score est « non-humiliant » est une manière de s’assurer que la famille apparaît unie et dans une cohérence programmatique. C’est aussi une manière de prévenir les trahisons ou les éparpillements. Par le passé, il a été constaté que le parti n’était pas derrière son candidat. Quand Éva Joly a gagné la primaire en 2011, l’appareil était derrière son adversaire, Nicolas Hulot, sans le dire. Éva Joly a fait ensuite une campagne très esseulée. Yannick Jadot est quelqu’un qui a la réputation d’être franc-tireur, de ne pas trop s’occuper du parti qui l’embarrasse. S’il avait gagné à une trop grande majorité, on aurait pu imaginer que ça n’emmène pas une dynamique pour les autres candidats. Le score de Sandrine Rousseau n’est par ailleurs pas anodin. Il va être difficile pour les gens qui soutenaient cette candidature et qui ne sont pas membres de l’un des