Tout l’été, « Les Jours » vous plongent dans un autre monde, celui de la justice française de 1973. Du lundi au vendredi à midi, nous publions des extraits des minutes correctionnelles du tribunal de grande instance de Paris d’il y a tout juste un demi-siècle. Un regard sur les délinquants du passé avec les mots de l’époque (lire l’épisode 1, « La délinquance, c’était mieux avant ? »). En accès libre.
«Prévenu : Hilaire Ponchateau, né le 2 mars 1932 à Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, employé aux écritures, marié, quatre enfants, demeurant 7, allée Romain-Rolland à Clichy-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, de nationalité française.
Attendu qu’il est établi par l’information et reconnu par le prévenu lors de l’enquête que Ponchateau, agent auxiliaire du ministère des Finances, direction des contributions indirectes, affecté à la recette du IXe arrondissement de Paris, a relevé en septembre 1969 dans les fiches des redevables le nom de la dame Crémont, commerçante à Paris, qui était débitrice envers le Trésor de 10 219,40 francs ; qu’il est allé la trouver lui proposant contre la somme de 4 000 francs de mettre à jour sa fiche, c’est-à-dire en clair de faire disparaître toute trace du surplus de la dette ; que comme la commerçante objectait qu’elle aurait de la difficulté à verser 4 000 francs d’un seul coup, il se contentait de lui demander de lui payer le montant de son échéance mensuelle, soit 1 449,25 francs afin d’arranger sa situation ; que la dame Parein a feint d’accepter, est allée trouver la police et devant les policiers, le 10 septembre 1969, dans un débit de boissons, a remis à Ponchateau la somme de 1 449,25 francs.
Attendu que ce dernier, interpellé aussitôt, ne contestant pas que l’argent lui était destiné personnellement. Attendu qu’il résulte de ce qui précède la preuve que Ponchateau, fonctionnaire de l’ordre administratif, a sollicité et reçu des dons pour faire un acte de ses fonctions non sujet à salaire ; que ces faits sont particulièrement graves et doivent être sanctionnés par une peine d’emprisonnement et une amende du double des choses reçues. Attendu toutefois que Ponchateau paraît digne d’indulgence qu’il échet de lui accorder le sursis à l’emprisonnement mais pour partie seulement de la peine qui va être prononcée.
Le tribunal déclare Ponchateau convaincu et coupable de corruption de fonctionnaire et le condamne à la peine de treize mois d’emprisonnement dont neuf mois avec sursis et à 2 898 francs d’amende. »