C’est l’une des images de la Contrescarpe les moins violentes diffusées par le tribunal. En ce 1er mai 2018, à Paris, on voit Alexandre Benalla tenir à bonne distance des badauds visiblement inquiets, alors que des CRS entourent une personne à terre. « Ici, vous considérez effectuer une opération de maintien de l’ordre ? », lui demande le magistrat assesseur. L’ex-chargé de mission de l’Élysée était présent, en ce 1er mai, en tant que simple observateur, au côté des forces de l’ordre. Mais il est largement intervenu, de façon appuyée, auprès de deux jeunes gens, comme l’a révélé par Le Monde, le 1er juillet 2018, à partir d’images filmée ce jour-là par le reporter Taha Bouhafs.
Trois ans plus tard, Alexandre Benalla se défend :
« C’est juste pour aider les policiers à faire leur travail, c’est un geste de civisme, comme sur un accident de voiture…
Ce n’est pas un accident de voiture !, rétorque la présidente, Isabelle Prévost-Desprez.
Le statut d’observateur n’existe pas ; là, je suis citoyen ! Il y a les gens qui préfèrent filmer et ceux qui facilitent l’action de la police… »
Autre prévenu au procès, Laurent Simonin, qui dirigeait le commandement des forces de police à Paris, le 1er mai 2018, est appelé à la barre. Il confirme qu’à ses yeux l’intervention d’Alexandre Benalla relève bien d’une action de maintien de l’ordre.
Sur les trois journées consacrées à ce volet de l’affaire par le tribunal, la ligne de défense d’Alexandre Benalla, accusé de violences place de la Contrescarpe, mais aussi, deux heures auparavant, au Jardin des plantes, à Paris, tient en un article martelé à la barre : l’article 73 du Code pénal. Qui affirme que toute personne qui assiste à un « délit flagrant » « a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche ». Mais dans leurs témoignages, lus à l’audience par le tribunal, plusieurs policiers et CRS ont jugé que les interventions d’Alexandre Benalla et de son acolyte, Vincent Crase, place de la Contrescarpe, avaient été peu opportunes. Parmi eux, le commandant Leleu, à la tête de la compagnie de CRS présente sur cette même place le 1er mai, a notamment déclaré qu’elle n’avait pas apporté « de plus-value significative » à l’opération menée par ses hommes. Pendant l’instruction, les enquêteurs ont découvert, dans le téléphone d’Alexandre Benalla, des recherches Google sur l’article 73 avant et après le 18 juillet 2018, date des révélations du Monde.
Le tribunal diffuse cartes, photos et vidéos sur grand écran. En vitesse normale et au ralenti. Il dissèque, sous tous les angles. Sur les premières images, Chloé P. se débat pendant qu’Alexandre Benalla la tient par la nuque puis tente de la faire asseoir par terre. Elle et son compagnon, Georgios D., étaient attablés lorsque les CRS ont investi la place de la Contrescarpe.