«Vous jugez une affaire déjà jugée par le tribunal de l’opinion. Les prévenus sont coupables. Ils sont marqués au fer rouge des réseaux sociaux », lance le procureur Yves Bardoc dans la salle d’audience, en direction de la présidente et de ses deux assesseurs. Au onzième jour du procès d’Alexandre Benalla et de ses trois coprévenus, le parquet entame son réquisitoire comme « un hommage à la nuance et à la complexité ». Dans ses observations liminaires, il évoque l’« hypermédiatisation » de l’affaire révélée le 18 juillet 2018 dans Le Monde. Aux cours des débats, l’argument a été plusieurs fois mis en avant par Alexandre Benalla et Vincent Crase pour pointer la « reconstruction a posteriori » des récits de leurs accusateurs. Les cinq jeunes gens que les deux hommes ont « interpellés »
Avant de passer en revue les différents volets de l’affaire, le procureur livre son analyse du personnage d’Alexandre Benalla, une figure « contrastée », dit-il, à la fois « professionnel compétent » et « jeune homme sans filtre rattrapé par son tempérament », « lancé dans une quête sans fin de réhabilitation ». Mais « ce qu’il faisait, il le faisait bien ». Il poursuit : « Ce qui est reproché à Alexandre Benalla relève avant tout de l’éthique professionnelle. » L’ancien chargé de mission de l’Élysée comparaît pourtant pour une douzaine de chefs d’accusation allant de « violences volontaires en réunion » à « faux et usage de faux » en passant par « usage public sans droit d’un insigne », « immixtion sans titre dans l’exercice d’une fonction publique », « violation du secret professionnel » ou « divulgation d’images de vidéoprotection ». Le procureur loue aussi « le dévouement » et « le sens de l’intérêt général » des prévenus.

Dans l’ordre des épisodes marquants de la saga Benalla, le tribunal avait choisi d’évoquer en premier celui du fameux selfie où le chargé de sécurité du candidat Macron apparaît pointant une arme sur le cou d’une serveuse, après un meeting à Poitiers en avril 2017 (lire l’épisode 3, « L’intrigant monsieur Benalla »). Ce qui ressemble fortement à un pistolet Glock était une arme « factice » a toujours soutenu Alexandre Benalla.