Un dessin de Charb montrant une femme enfermée dans une burqa qui lui laisse les fesses à l’air, fredonnant le tube « chacun fait-fait-fait ce qu’il lui plaît-plaît-plaît », a mis la cour d’assises cul par-dessus-tête. Projeté parmi d’autres à la demande de la famille du dessinateur tué le 7 janvier, il a emporté le prétoire dans un surréaliste éclat de rire général, associant juges, familles de victimes, survivants et certains accusés. C’était le 11 septembre, au bout d’une semaine d’abomination, remplie des photos sanglantes de la scène de crime, de récits hallucinés des tueries, de pleurs sur les vies enfuies (lire l’épisode 4, « “Cet attentat, il est en moi comme incarné dans ma peau” »). Soudainement, avec ce rire qui mettait quelque peu l’horreur à distance, on s’est aussi souvenu qu’il y avait onze hommes à juger, et qu’ils niaient toute implication terroriste (lire l’épisode 2, « Attentats de janvier 2015 : le procès des spectres »).
C’est l’enjeu véritable de ce procès : ces onze « arsouilles », voyous multi-condamnés du box, accusés d’aide logistique, peuvent-ils être sanctionnés au même niveau et avec les mêmes incriminations terroristes que des jihadistes ? Est-on en présence d’un authentique « deuxième cercle » d’Al Qaeda et de l’État islamique, des bandits parfois radicalisés qui ont appuyé idéologiquement une campagne d’assassinats ? Sont-ils au contraire de simples « idiots utiles » des fanatiques, mis à contribution mais tenus dans l’ignorance des projets véritables ? La peine encourue, suivant qu’on retienne l’un ou l’autre de ces scénarios, va du simple au double.