Il y a trente ans avait lieu un invraisemblable téléscopage entre deux histoires du crime français qui n’auraient jamais dû se rencontrer. Le prédateur sexuel Michel Fourniret assassinait la femme d’un de ses ex-codétenus pour voler au fond d’un cimetière le trésor des Postiches, fameux gang de braqueurs de banque des années 1980. Les années ont passé. Le couple Fourniret a poursuivi son équipée sanglante jusqu’à son arrestation au début des années 2000. Les Postiches, eux, ont fait de la prison et leurs destins se sont séparés (lire l’épisode 11, « Fourniret et les Postiches, mortelle chronologie »). Mais l’histoire a laissé des traces. Si certains protagonistes en ont réchappé, ces rencontres hasardeuses se sont souvent avérées destructrices

Pour s’alléger de son hérédité, Sélim Fourniret, le fils unique du couple criminel Michel Fourniret-Monique Olivier, né le 9 septembre 1988 à Charleville-Mézières (Ardennes), a été obligé de saborder son identité. Il a modifié son état civil, y compris les prénoms que son père lui avait donnés en hommage à des codétenus : celui de Sélim Sequiri, un Albanais qui avait tué un magistrat, et, en troisième, celui de Jean-Pierre Hellegouarch (lire l’épisode 3, « L’étrange détenu Fourniret »). Pour survivre, il a dû tuer symboliquement ses parents et les décréter morts : « Ce sont des inconnus », répète le descendant de « l’ogre des Ardennes ». Aux enquêteurs de la police judiciaire qui l’ont entendu le 12 mai 2016 au sujet de ses éventuels souvenirs et de ses vénéneux géniteurs, Sélim Fourniret dit qu’il souhaite les enterrer à jamais et refuse tout contact : « Je ne veux plus les voir. » Le jeune homme déclare sur procès-verbal qu’il ne supporte ni leur duplicité ni leur manipulation. « Mes parents m’ont menti. J’ai appris qu’ils se sont servis de moi comme appât. » Et ce, notamment pour attirer des baby-sitters et Élisabeth Brichet, 12 ans, à Noël 1989 (lire l’épisode 8, « Dans le château de l’ogre »). Durant le procès devant les assises des Yvelines à Versailles, en novembre 2018 (lire l’épisode 12, « Fourniret, le même en vieux »), Monique Olivier prétendra que ce n’est pas vrai : « Non, il se trompe, on ne l’a pas utilisé. Je ne sais pas pourquoi il le dit, mais c’est faux. » Pourtant, le bébé dans le siège-auto a bien endormi la méfiance de fillettes qui montaient dans le véhicule des Fourniret. Michel Fourniret refusera lui aussi d’admettre qu’il a utilisé son enfant. « Ce n’est pas le cas », soutient-il mordicus.