Au bout de quatre bonnes années de braquages aussi spectaculaires qu’enrichissants, le gang des postiches a été piégé par la police à la sortie du Crédit lyonnais de la rue du Docteur-Blanche, dans le XVIe arrondissement de Paris. Ce 14 janvier 1986, jour de la mort de Daniel Balavoine, l’ultime braquage des gangsters déguisés s’est terminé dans le sang et dans le caniveau (lire l’épisode 4, « Le dernier bal des Postiches »). Jean Vrindts, un policier de la BRB, et un Postiche, Bruno Berliner, sont morts. Robert Marguery a été arrêté. Les autres ont pris la fuite. L’un d’eux va sauver la bande en organisant la suite.
Ce 14 janvier 1986, Jean-Claude Myszka a pris la tangente à pied dans la confusion de la fusillade rue du Docteur-Blanche. Sa chapka bien enfoncée sur sa tignasse blonde, le ferrailleur polonais croise des policiers et leur lance : « Ça tire par là-bas, vous devriez y aller. » Il fait le mariole, mais il a la trouille, comme il me l’avouera plus tard : « J’avais qu’une hâte, filer, car j’avais peur. » II se débarrasse dans une poubelle de ses lunettes et de sa chapka. Il monte dans le premier bus qui passe sur l’avenue Mozart. Il fouille dans ses poches mais pas une pièce de monnaie pour payer le ticket. Rançon de la gloire, Myszka n’a que des billets de 500 francs. Il tremble. Le conducteur de bus finit par accepter son Pascal flambant neuf. Myszka descend porte de Saint-Cloud, prend un taxi et arrive à Aubervilliers vers 17 h 30. Il fait un temps à pleurer. Il jette son loden dégoulinant en bordure du chemin de fer, porte de la Villette, et enterre son arme au pied du premier pilier. Il s’achète un blouson de cuir noir et un jean bleu. Myszka récupère sa Honda 1 000 F2 rouge et roule sur le périph, pour se « calmer » les nerfs. Il se rend dans un repaire de la bande, résidence Gandolfi à Saint-Maur-des-Fossés, pour nettoyer les lieux. Myszka rassemble les affaires de Bruno Berliner tombé sous les balles, de Robert Marguery arrêté par la PJ et les siennes, fourre le tout dans un sac, avale « des cachets pour tenir le coup ». Son copain de Belleville, « Sœur sourire », qui a partagé ses joies et ses misères à l’Institution Weiss pour enfants difficiles à la fin des années 1960 (lire l’épisode 2, « Les Postiches, naissance d’un gang de braqueurs »), est tout froid à la morgue.
Le lendemain, le costaud s’inquiète de l’état de ses comparses et rejoint à tout hasard une planque secrète où, miracle, se terrent deux autres rescapés : « Moumoute » et « Loden vert », surnoms de leurs déguisements de braqueurs, qui avaient pris en otages et blessé deux policiers dans une fuite éperdue et incontrôlée.