Ce 5 novembre, la 14e chambre correctionnelle du tribunal de Bobigny s’est vidée aussi vite qu’elle s’est remplie, elle qui juge chaque premier jeudi du mois des fonctionnaires de police de Seine-Saint-Denis. Il a d’abord fallu refuser du monde tant le public était venu nombreux pour entendre le jugement de Valentin L. et Jonathan F. Lors d’un contrôle routier, le 16 août 2021, ces deux brigadiers de Stains avaient tiré à huit reprises en moins de sept secondes sur Nordine A. et Merryl B., les blessant grièvement. Le tribunal les a condamnés à quatre ans de prison avec sursis, assortis d’une interdiction définitive d’exercer dans la police nationale et de porter des armes pendant cinq ans. Ils ont interjeté appel. À l’énoncé de la décision, le regard de Nordine A. s’est embué. Puis, encadré par deux fonctionnaires, il est sorti de la salle direction prison, purger la fin des deux ans ferme dont il a écopé pour le refus d’obtempérer commis ce 16 août 2021 (lire l’épisode 2, « À Stains, deux blessés graves et des policiers qui n’entendent pas leurs balles »). Le public, lui, a déjà filé.
Sur les bancs ne restent plus que deux quinquagénaires en costume et quelques costauds serrés en rangs d’oignons. À l’appel de leurs noms, deux d’entre eux s’avancent à la barre. Il s’agit des gardiens de la paix Thomas B. et Vincent R., 31 ans tous les deux, carrures de déménageurs, barbes fournies et cheveux ras, bien dégagés au-dessus des oreilles.