Pour la direction de Twitter, c’est un témoignage qui tombe très mal dans la bataille qui l’oppose à Elon Musk. Quelques jours après que le milliardaire a annoncé qu’il retirait son offre de rachat, le 8 juillet, plusieurs agences gouvernementales et des commissions parlementaires ont reçu un document de 200 pages rédigé par l’ancien directeur de la sécurité informatique de l’entreprise, Peiter « Mudge » Zatko. Cet ancien hacker très réputé dans le milieu de la sécurité informatique (il a travaillé pour Google et le Pentagone) est resté quatorze mois chez Twitter. Embauché par Jack Dorsey (lire l’épisode 2, « L’intrigant M. Dorsey »), il a été viré par Parag Agrawal en janvier 2022, officiellement pour « leadership inefficace et mauvaises performances ». « Mudge » considère lui que ce sont ses alertes concernant les « déficiences extrêmes » de Twitter en matière de sécurité qui lui ont valu son licenciement. Et il s’est placé sous le statut protecteur de lanceur d’alerte.
Entendu mardi par la commission des affaires judiciaires du Sénat, l’ex-hacker a développé ses critiques contre son ancien employeur. À savoir que ce dernier fonctionnerait avec des « logiciels obsolètes dépourvus de mesures de sécurité de base », que la moitié des employés peuvent accéder aux données confidentielles de leurs utilisateurs sans que la direction puisse le détecter et que, du fait des ces lacunes, l’entreprise est gangrenée par des espions travaillant pour des États peu démocratiques voulant surveiller leur population. Dans son document, « Mudge » avait assuré que les dirigeants de Twitter n’avaient « aucune envie de mesurer correctement la prévalence des comptes de bots » car « si des mesures précises devenaient publiques, cela nuirait à l’image et à la valorisation de l’entreprise ». Face aux sénateurs, il a cité l’écrivain Upton Sinclair pour qui « il est extrêmement difficile de faire comprendre quelque chose à quelqu’un si son salaire dépend du fait qu’il ne le comprenne pas ».
Pendant l’audition, Elon Musk a tweeté… un simple émoji popcorn. Même s’il n’a pas été question de son opération de rachat avortée (qui, dans un timing un peu étrange, a été approuvée mardi par les actionnaires de Twitter), le milliardaire a de quoi être ravi de ce témoignage.