Chaque jour de grève vers 6 h 30, Valéry Vuong enfile le gilet rouge sans manches qui pend au portemanteau de son bureau et file sur les quais de la gare Saint-Lazare, à Paris. Un comptoir sur roulettes attend à l’entrée de la voie 19, face aux flux des passagers recrachés par les TER et les Transilien. Derrière ce guichet mobile, armés d’une liste des trains qui circulent, les cadres non-grévistes de la gare sont envoyés au front pour répondre aux usagers. « Est-ce qu’il y aura un retour pour Pontoise vers 17 heures ? » « Vous avez les horaires de la ligne J pour Poissy ? » Valéry Vuong compulse sa liasse, les escorte jusqu’au panneau d’affichage, tamponne des bulletins de retard – des mots d’excuse – pour leurs patrons. « Ils sont super polis, disent bonjour, au revoir, souffle le quadra, satisfait. Les gens sont au courant, ça se passe bien. » Quelques jours avant le début de la mobilisation des cheminots contre la réforme ferroviaire, il avait reçu un SMS de sa direction. « Appel à volontaires d’information. On compte sur vous ! Merci de votre mobilisation. » Difficile de dire non.
Hors période de gros temps social sous les verrières de Saint-Lazare, le quotidien de Valéry Vuong se déroule deux étages au dessus des rails, dans un petit bureau avec cheminée qui donne sur la rue de Rome, dans le VIIIe arrondissement de Paris.