Certains commentateurs attendent la « cristallisation » des sondages autant qu’un enfant qui demanderait « Est-ce que c’est le bouquet final ? » dès que le feu d’artifice commence. La cristallisation, c’est le moment où une très grande majorité des électeurs est certaine de son vote et où les courbes des différents agrégateurs se stabilisent. Le premier tour de l’élection présidentielle se rapproche (info Les Jours : dans une semaine !), plus de 300 sondages ont été publiés, dont un tiers pendant le mois de mars. Les études d’opinion prennent une place croissante dans la tête des candidats, des journalistes et des électeurs. Selon que son candidat de choix soit au pied du podium ou en tête, on convoque un croisement des courbes, on appelle au « vote utile », ou on espère
« À 15,5 %, Mélenchon dans la marge d’erreur pour le second tour », titre lundi 28 mars L’Insoumission, média officiel de La France insoumise, citant un sondage d’Ipsos. Il y a quelques mois, le même média et les Insoumis contestaient pourtant les méthodes de l’institut, mais les chiffres étaient nettement moins bons pour leur candidat. « Vous le sentez venir le croisement des courbes ? », s’interroge sur Twitter l’eurodéputée Insoumise Manon Aubry. Bastien Lachaud, député Insoumis de Seine-Saint-Denis, constate de son côté : « Entre Mélenchon et Le Pen, il y a juste la marge d’erreur du sondage, la progression de la 🐢 se poursuit. »
En renfort de ce croisement des courbes espéré, les Insoumis ont également un autre argument : le « vote gonflé » pour Marine Le Pen. Selon le même Bastien Lachaud, chiffres à l’appui, les derniers sondages ont toujours donné le Rassemblement national plus haut que ce qu’il n’était réellement le jour des élections. Pour les élections présidentielle et législatives de 2017 et les régionales de 2021, il choisit un sondage par élection et le compare aux résultats finaux des candidats du Rassemblement national. Son graphique est cependant légèrement trompeur : seuls ont été sélectionnés les élections et sondages allant dans son sens. En 2012, par exemple, la candidate était régulièrement sous-estimée : selon le site Depuis1958.fr, qui a compilé 64 ans de présidentielles, les intentions de vote pour la candidate d’extrême droite étaient en moyenne à 15,6 % à la veille du premier tour, contre un score de 17,9 %, et Jean-Luc Mélenchon était mesuré à 13,7 %, alors qu’il n’a rassemblé que 11,1 % des électeurs dans les urnes.

Pour 2017 cependant, tous les sondages accordaient à Marine Le Pen plus d’intentions de vote qu’elle n’en aura au soir de l’élection, même si celles-ci restaient dans la marge d’erreur.