L’île britannique d’Henderson est totalement déserte. À part quelques scientifiques une ou deux fois par décennie, personne ne met jamais les pieds sur cet atoll de 47 kilomètres carrés perdu au milieu du Pacifique Sud. Pourtant, au moins 17 tonnes de déchets la souillent. On trouve en moyenne 671 morceaux de plastique par mètre carré sur ses plages. Tous ont été laissés là par les eaux, et donc avant cela en très grande partie jetés dans nos fleuves et nos rivières (lire l’épisode 6, « Les excuses bidon »). En découvrant cette histoire, je me suis imaginé envoyé spécial dans le Pacifique Sud pour poursuivre mon enquête démarrée au Havre sur l’archéologie de nos déchets.
Finalement, j’ai pris un TER direction Rouen et j’ai traversé une zone industrielle à vélo pour rejoindre les berges de la Seine. Parce que le billet était moins cher, et parce que les quantités de déchets relevées le long de ce fleuve sont largement aussi flippantes qu’à Henderson. En longeant la Seine, sur certaines berges, on marche en effet sur des décennies de détritus accumulés au fil des marées.
Avant 1997, personne n’avait essayé de calculer les volumes de déchets sur les berges de la Seine. De l’Eure à la Seine-Maritime, l’écologue Michel Lerond a longé cette année-là la Seine, en voiture et à pied, du barrage de Poses au pont de Tancarville, et réalisé de nombreux relevés et estimations.