Déjà un mois que Vincent est assigné à résidence. S’il avait été privé de liberté par une décision de justice, l’accusation aurait dû prouver sa culpabilité. Pas là. L’état d’urgence a sa logique propre, extra-judiciaire. Puisque le ministère de l’Intérieur l’a déclaré potentiellement dangereux sur la foi d’une note blanche des services de renseignement (lire l’épisode 14), il sera traité comme un coupable.
Certes, des voies de recours existent. Lorsque Vincent tente – sans succès – de faire lever son assignation à résidence par le tribunal administratif, le requérant, c’est lui. Pourtant, il parle de [son] procès
. Une petite phrase, l’air de rien : Ma femme me disait de raser ma barbe avant d’aller à mon procès.
Elle voulait éviter qu’il ait l’air trop musulman. Vincent n’a pas suivi son conseil. De toute façon, il n’imaginait pas qu’un juge irait à l’encontre d’une décision du ministère
. Pour lui, les choses sont claires : c’est l’exécutif qui commande. Vu le contexte, difficile de lui donner tort sur ce point. Au moment de la publication de cet article, sur les 103 référés déposés depuis le début de l’état d’urgence, les tribunaux administratifs n’en ont suspendu que cinq, selon le décompte établi par la commission parlementaire de contrôle de l’état d’urgence, sur la base de chiffres du ministère de l’Intérieur.
Comment rendre compte de ce climat ? Les Jours n’ont pas organisé de casting pour trouver le « bon client » parmi les 381 assignés à résidence de l’état d’urgence.