Dans nos esprits chagrinés par le souvenir d’une épaule endolorie, qui dit vaccination dit seringue. Un vaccin, c’est forcément une piqûre dans le deltoïde, une « IM » (pour « intramusculaire »), comme disent les pros. Une injection qui permet d’introduire dans le sang le sosie inoffensif d’un microbe, afin que les sentinelles de l’immunité sachent le reconnaître et le combattre dès la première réelle intrusion (lire l’épisode 17 de Nouvelle vague, « Vaccins : questions pour une injection »). Et ça marche. Ça pique, mais ça marche. Même dans le cas du Covid-19, les vaccinés, dans l’immense majorité des cas, ne développent pas de forme grave de la maladie.
Sauf que, si l’on regarde en détail comment l’immunité naturelle se met en place face au coronavirus, la stratégie de la piqûre vaccinale actuellement utilisée ne semble pas être la meilleure. Car dans la vraie vie, le virus n’arrive pas dans le corps par le sang : il entre par le nez ou par la bouche, et colonise d’abord ce qu’on appelle les « voies respiratoires supérieures ». C’est là, dans les fosses nasales et dans le pharynx, que le virus s’installe en premier lieu. C’est donc là aussi, au niveau des muqueuses, qu’a lieu la première réaction défensive naturelle. Une réaction parfois très efficace, comme en témoignent les études menées sur les patients asymptomatiques, qui sont nombreux. « On voit que, parmi les contaminés, ceux qui ont très peu de symptômes sont ceux qui ont une réponse immunitaire mucosale qui est intense et rapide, remarque Stéphane Paul, professeur d’immunologie au CHU de Saint-Étienne et membre du comité scientifique sur les vaccins Covid-19. Quatre ou cinq jours après le premier contact avec le virus, on voit apparaître, dans leurs prélèvements salivaires, des IgA dirigées contre le spicule (la protéine-clé de la contamination, ndlr). » Des IgA ? Des immunoglobulines A, un type d’anticorps très répandu, qui sont sécrétées par les muqueuses, contrairement aux IgG (immunoglobulines G), celles dont les vaccins classiques déclenchent la production et qui affluent dans le sérum sanguin. « Les personnes qui tombent gravement malades ont quant à elles peu de ces IgA dans la salive ou dans les poumons. En revanche, on en retrouve en grande quantité dans leur sang, où elles ont malheureusement tendance à entraver l’action des IgG », poursuit le chercheur. Les mécanismes qui provoquent ce déséquilibre ne sont pas encore compris.