S’il déboule dans votre mail à l’heure habituelle avec sa sirène mensuelle, c’est un épisode des « Dessous des “Jours” » un peu singulier que vous allez lire. Car les temps que nous vivons sont un peu singuliers, ça n’a pas pu vous échapper
Alors les coulisses des Jours, depuis ce 9 juin-là ? Ça a démarré par des coups de fil dans tous les sens le dimanche et, le lundi 10 heures, par une conférence de rédaction où on a à peine eu besoin de se dire que, désormais, on mettait tout sur cette dissolution. Ça veut dire mettre tout notre programme de côté et bander tous nos petits muscles sur ce sujet-là. Ça veut dire enquêter, aller sur le terrain, analyser ce bouleversement, sauter dans un RER pour aller sonder le scrutin de la communauté juive à Sarcelles, dans une voiture pour comprendre les ressorts du vote RN dans les communes rurales, sur un vélo pour rencontrer le meilleur chercheur qui nous aidera à réfléchir, écouter (en hululant) Hanouna… Depuis ce jour-là, on aura publié 27 épisodes dans La dissolution d’Emmanuel Macron : un exploit pour notre rédaction, mais impossible de faire autrement.
Voilà les dessous des journées des Jours, voire des nuits, jusqu’à très tard, au soir du 30 juin. Mais même s’il a fallu gratter jusqu’au sang pour trouver quelque chose de positif dans ce marasme, voici : ça fait se poser des questions sur ce qu’on fait, comment on le fait, pourquoi on le fait. Si nous nous sommes lancés en 2016 dans ce projet fou des Jours d’obsessions déclinées en séries journalistiques, c’est autour de valeurs éditoriales : aller fouiller là où les autres ne vont pas et enquêter, révéler et ne pas lâcher. Au plus près de jihadistes français de retour de Syrie (Les revenants, prix Albert-Londres 2017). Sur les traces de migrants disparus en mer, ou de ceux de Calais tués lors de la traversée de la Manche. Dans les coulisses des pouvoirs économiques, politiques, médiatiques (c’est ainsi que, depuis 2016, nous mettons au jour le projet idéologique de Vincent Bolloré). Au plus brûlant de l’urgence climatique, au cœur des dérives sectaires, au plus près des violences conjugales et des féminicides… Le maillage de nos obsessions, de nos séries journalistiques tresse la vision du monde des Jours : progressiste, écologiste, féministe, humaniste, antiraciste. Qui a dit « wokiste » ? Moi, et j’en suis fière.
Et ce que nous faisons là, c’est l’exact opposé du projet mortifère porté par le RN : xénophobe, raciste, discriminatoire, liberticide, porté par le repli sur soi et la haine de l’autre. Un projet propulsé par un groupe de médias rebâti sur les cendres de rédactions expulsées de leur médias, basé sur la transgression des règles, sur la désinformation et les fake news. Le RN qui veut privatiser l’audiovisuel public, l’extrême droite qui, partout où elle est au pouvoir, musèle, censure, menace les médias, coupe les aides à la presse. Cette même extrême droite qui est aujourd’hui à deux doigts de gouverner la France est un danger pour les médias indépendants, un danger pour Les Jours. Imaginez ce qu’un RN au pouvoir ferait du média qui enquête au long cours sur son porte-voix, Vincent Bolloré.
Notre seul bouclier anti-RN, c’est notre indépendance : Les Jours sont détenus à près de 80 % par les journalistes cofondateur·rice·s et les abonné·e·s actionnaires, et nous ne vivons que des abonnements et des dons. Dans le monde qui nous attend, quel que soit le résultat le 7 juillet, le RN n’aura jamais été aussi puissant, et le besoin de médias indépendants, jamais aussi criant.
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