S’il faut reconnaître une chose aux manifs de droite, c’est que les gens sont polis. Vous effleurent-ils à peine d’un parapluie qu’ils se confondent aussitôt en excuses. Mais les voilà illico après vociférant : contre Juppé, contre Macron, contre les journalistes, contre les chaînes info, ahlala les chaînes info. « On en a ras-le-bol des chaînes info, vitupère ainsi une femme s’adressant à qui veut l’entendre. Et la présomption d’innocence ? Il y a tout de même une loi contre le harcèlement ! » Sous son chapeau de pluie, la dame est indignée, très indignée, même. Et ce dimanche, la place du Trocadéro l’est tout autant où, d’un groupe à l’autre, le peuple filloniste se rassérène en échangeant les mêmes arguments – Juppé, Macron, les journalistes. Ils sont d’accord dans leur rancœur, ça les réconforte. Les banderoles étaient interdites par l’organisation, s’agissait pas que le mot d’ordre initial contre les juges apparaisse à l’écran. À la place, des drapeaux français, et uniquement des drapeaux français, aimablement et gracieusement fournis par l’équipe : c’est ça qu’il faut sur les chaînes info, une marée d’oriflammes portant le candidat, leur candidat. À la télé, où s’est postée une moitié des auteurs, c’était réussi. Au Trocadéro, où s’est postée l’autre moitié, ça fulminait sous l’écume bleu-blanc-rouge.
Sur BFMTV, il n’est pas encore 15 heures et pour les images en bleu-blanc-rouge espérées par l’équipe Fillon, on n’y est pas encore : le bleu est présent, le blanc itou ainsi que le rouge, mais les couleurs sont diluées dans la foule encore clairsemée. D’ailleurs, comme il est indiqué en haut à droite de l’écran, ce sont des « images BFMTV ». Précision d’importance, car ce ne sera pas le cas tout le long de la spéciale. C’est Nicolas Sarkozy qui a eu cette ingénieuse idée en 2007 : fournir gracieusement aux télés de parfaites images, flatteuses pour le candidat, clés en main. Et surtout, ne pas leur laisser le choix, aux télés, en réservant aux équipes de tournage des candidats les meilleures places pour filmer. Oui, on est d’accord, ça s’appelle de la propagande. Et les chaînes info auront beau estampiller les « images fournies par le candidat » comme telles, au moment du discours de François Fillon, ce sont elles, ces images clinquantes, qui resteront imprimées dans les rétines téléspectatrices.
LCI et BFM, je vous l’assure, ce sont des chaînes communistes, c’est aussi simple que ça.
Avant même la place du Trocadéro, ils ont commencé dans le métro d’abord en parlant à mi-voix – Macron, Juppé, les journalistes.